L’exaspérante formule «bonjour-hi» qui depuis des années, s’est imposée dans le langage courant des Montréalais vient enfin d’être perçue politiquement pour ce qu’elle est: un symptôme indéniable de l’anglicisation de Montréal. C’était une évidence, mais c’est désormais une évidence politiquement reconnue. Le bonjour-hi n’a rien d’une marque de courtoisie. C’est une forme de capitulation linguistique au quotidien. Cette formule envoie un signal simple: à Montréal, le français n’est qu’une langue sur deux, et certainement pas la plus importante. Elle est optionnelle. On peut la parler ou non, cela n’a pas grande importance, car toujours, il sera possible de passer à l’anglais. Dans certains quartiers de Montréal, on ne s’encombre même plus du bonjour, d’ailleurs. On pourrait dire la même chose de Laval. Et ceux qui insistent pour faire valoir les droits du français et réaffirmer son statut sont accusés d’agressivité linguistique, de nostalgie nationaliste, d’anglophobie ou même de racisme. Dès que les Québécois francophones veulent rappeler qu’ils ne sont pas des étrangers chez eux, on les accuse d’extrémisme. C’est la nouvelle manière de dire Speak white.
Le temps de la langue française conquérante (ou reconquérante, pour être plus exact) semble bien loin et celui qui, à Montréal, lancerait de nouveau le slogan maîtres chez nous serait soupçonné des pires pensées. Globalement, nos élites veulent nous faire croire que le français se porte bien dans la métropole. Elles ne cessent de nous répéter qu’il fait des progrès et que s’il faut demeurer vigilant, il ne faut pas trop s’inquiéter. L’optimisme linguistique est la doctrine officielle de l’État québécois et il ne faudrait plus jamais miser sur un renforcement de la loi 101 pour assurer la promotion du français. La grande cause de notre temps ne serait plus celle de la francisation de Montréal mais bien celle de la bilinguisation des Québécois francophones pour leur permettre d’être un peuple pleinement adapté à la mondialisation. On traite la culture nationale comme un folklore local ne devant incommoder ni les touristes, ni les investisseurs. Apparemment, les Québécois ne seraient pas encore assez ouverts sur le monde. N’est-ce pas le défaut congénital que Pierre Trudeau leur prêtait? Laissé à lui-même, le Québécois francophone se soumettrait à ses pires instincts: il aurait l’instinct tribal. Il aurait besoin du fédéralisme canadien pour le civiliser, pour contenir ses pulsions mauvaises: la démocratie, chez nous, viendrait de l’extérieur.
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