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Sujet : La civilisation, entre flou barbare et ordre trivial

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shayde09 shayde09
MP
Niveau 14
21 novembre 2016 à 13:43:57

La civilisation est un équilibre précaire entre [...] le flou barbare et l'ordre trivial. Le barbarisme est unifié mais indifférencié ; la trivialité est différenciée mais n'a aucune cohésion centrale ; l'idéal de la civilisation est l'intégration, en un tout complet et au prix d'une tension minimale, d'un maximum d'activités distinctes.

Considérons la danse primitive de telle tribu appelant une bonne récolte : un tel phénomène ne peut être appréhendé de manière satisfaisante par l'oeil analytique. Il est impossible d'y voir d'abord un jeu esthétique, entrepris pour le simple plaisir qu'il donne aux participants le pratiquant avec beauté ; ou d'abord un rituel religieux, l'expression d'une piété intérieure envers les puissances régissant les récoltes ; ou d'abord une technique scientifique pour s'assurer du phénomène réel d'une bonne récolte -- il est en effet idiot de ne serait-ce que penser en ces termes, car les danceurs n'ont pas appris à faire de telles distinctions et ne peuvent comprendre ce qu'elles signifient.

A l'inverse, dans une société comme la nôtre, quand un homme va voir un ballet, il y va simplement pour se divertir et ne demande qu'à ce que la chorégraphie et la représentation soient esthétiquement réussies ; quand il va à la messe, il sait qu'il n'importe pas que celle-ci soit bien ou mal chantée, car seule compte l'attitude de sa volonté envers Dieu et son prochain ; quand il laboure un champ, peu lui chaut de savoir si le tracteur est beau ou laid ou si lui-même est un pécheur repentant ou récalcitrant -- rien de tout cela ne déterminera le succès ou l'échec de la tâche à accomplir. Son problème est tout autre que celui du sauvage ; le danger pour lui est qu'au lieu d'être une personne entière à chaque instant, il soit divisé en trois fragments sans rapport les uns aux autres et se disputant la préséance : le fragment esthétique qui va au ballet, le religieux qui va à la messe, et le pratique qui gagne sa vie.

Si l'on doit juger une civilisation sur ce double critère, le degré de diversité atteint et le degré d'unité conservée, alors il va sans dire que les Athéniens du cinquième siècle avant J.C. étaient le peuple le plus civilisé ayant existé à ce jour. Le fait que presque tous les mots que nous utilisons pour définir des activités et des branches de savoir (la chimie, la physique, l'économie, la politique, l'éthique, l'esthétique, la théologie, la tragédie, la comédie, etc.) nous viennent des Grecs prouve leurs facultés de différenciation consciente ; leur littérature et leur Histoire témoignent quant à elles de leur capacité à maintenir un sens de corrélation unifiée, un sens que nous avons en grande partie perdu comme eux-mêmes l'ont perdu dans un intervalle de temps similairement bref.

''W.H. Auden, "The Greeks and Us" (traduction personnelle).

''

C'est quelque chose que j'observe en effet avec une légère angoisse dans notre société occidentale actuelle. On distingue les savoirs et les activités, on désenchante le monde, mais il n'y a aucun absolu pour subsumer le tout... Lyotard y voyait un avantage de la civilisation post-moderne : les "grands récits" totalitaires qui asservissaient les sciences et les arts mouraient pour faire place à une multitude de "petits récits" individuels, autonomes, paisibles et porteurs de progrès. Cette situation est évidemment préférable aux totalitarismes, mais en perdant toute unité directrice notre civilisation se désagrège lentement, le sens de la vie et de l'Histoire disparaît (nos historiens ne s'identifient guère plus au passé de leur peuple, mais le dissèquent froidement comme un simple objet de science ; à l'opposé il y a l'Histoire-spectacle-feux-de-l'amour de Stéphane Bern, qui est une autre forme d'aliénation), et les individus se demandent de plus en plus ce qu'ils foutent sous le soleil. Et là, vanité des vanités...

Quelles sont les racines qui grippent, quelles sont les branches qui croissent
Parmi ces rocailleux débris ? Fils de l'homme,
Tu ne peux le dire ni le deviner, ne connaissant
Qu'un amas d'images brisées sur lesquelles tape le soleil :
L'arbre mort n'offre aucun abri, la sauterelle aucun répit,
La pierre sèche aucun bruit d'eau. Il n'est
D'ombre que là, dessous ce rocher rouge
(Viens t'abriter à l'ombre de ce rocher rouge)
Et je te montrerai quelque chose qui n'est
Ni ton ombre au matin marchant derrière toi,
Ni ton ombre le soir surgie à ta rencontre;
Je te montrerai ton effroi dans une poignée de poussière. (T.S. Eliot)

Même et sans doute surtout à l'échelle individuelle c'est frappant : les gens compartiment leur existence. Il y a le travail et les loisirs ou les vacances ; il y a la "BA [bonne action] du jour" et le temps consacré à soi ("octroyez-vous une pause plaisir") ; il y a les études et la vie sociale, l'amour et l'amitié, et l'on fait bien attention à conserver un équilibre entre tout cela. Les gens planifient leur vie : je reste célibataire jusqu'à tel âge puis je me marie, puis je deviens propriétaire, etc. Je ne dis pas que c'est forcément mal, et je suis sensible au passage célèbre de l'Ecclésiaste ("il y a un temps pour tout...") ; mais l'on risque de manquer l'essence de toutes ces activités à force de les séparer et de ne plus voir les liens qui les unissent ou l'absolu qui leur donne sens. En un sens, la vraie spiritualité n'est-elle pas de faire disparaître la distinction entre le sacré et le profane, de sorte que mêmes les gestes les plus quotidiens soient auréolés de grâce, que chacun de nos pas nous rapproche du coeur de Dieu, et qu'un ordre de solennités nouvelles se compose au plus haut faîte de l'instant (comme le chante Saint John Perse) ?

Son_Eminence Son_Eminence
MP
Niveau 10
21 novembre 2016 à 19:04:39

Mmmm... Je préfère notre société libre actuelle où l'on laisse à chacun le soin de se trouver un sens s'il le souhaite, quand il le souhaite et comme il le souhaite. Certains peuvent opter pour un sens religieux, d'autres voir la cohérence dans le mouvement de la vie, d'autres s'en foutre (ça donne des gens cons mais je ne suis pas obligé de les fréquenter). Je préfère cela à une société qui offrirait un sens officielle comme la France catho du Moyen Age ou de l'Ancien Régime, au risque de dévier vers un totalitarisme.

Après si l'on veut au delà un sens qui nous relie tous ensemble, une couche de sens supplémentaire que nous ayons tous en commun, la République nous le propose...

shayde09 shayde09
MP
Niveau 14
01 décembre 2016 à 11:41:27

Je ne parle pas d'un "sens de la vie officiel", mais d'une métaphysique plus large et plus diffuse. Les Grecs n'étaient pas obligés de croire en leurs dieux, mais ils partageaient néanmoins un fabuleux terreau de pensée aux fruits nombreux et variés. Leurs sciences et leurs arts constituaient un archipel de jardins reliés par des ponts. Ils avaient conscience à la fois de l'hétérogénéité du réel et de son unification possible; à la fois du passage que de l'éternité. C'est tout le travail de Platon et d'Aristote que de concilier les deux. Les Grecs étaient habités d'un profond respect pour l'homme et l'univers, dont ils reconnaissaient et admiraient le mystère; leur mythologie n'était pas tant un ensemble officiel de croyances arbitraires qu'un langage commun expliquant et connectant les différents aspects de leur vie.

Je sens qu'on a perdu ce respect du mystère aujourd'hui. L'oeil analytique fragmente trop le réel et en perd son unité sacrée.

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