Bonjour, dans son livre Du bon usage de la torture, Michel Terestchenko pose cette question pour nous permettre de nous positionner : si la torture permet d'éviter une explosion dans une école primaire tuant des dizaines d'enfants, est-elle légitime
Perso je suis bien embarrassé face à une telle question. Kant nous recommanderait de dire non (agis de telle manière que la maxime correspondant à tes actes puisse servir de morale universelle).
En fait, a priori, le respect de la dignité humaine ne doit pas être seulement notre objectif, il doit concerner aussi les moyens que nous utilisons. Mais le problème dans cet exemple c'est que l'impact sur la dignité humaine est bien pire en ce qui concerne l'objectif (la vie d'enfants innocents) qu'en ce qui concerne le moyen (la douleur d'un terroriste).
Cela dit, si je choisis la douleur du terroriste, c'est moi (ou l'entité que je soutiens, ce qui revient au même) qui piétine le respect de la personne humaine... Mais j'opte pour la mort des enfants, n'ai-je pas fait preuve de lâcheté en choisissant un mal plus grand par peur de faire le mal moi-même ?
de vos partages.
va savoir. Avec la doxa politique actuelle, marine le pen a du s'excuser d'avoir osé suggérer la torture du type qui avait une bombe sur le point d'exploser.
Quand je vois ça ... si tu savais ce que j'en pensais de la "dignité humaine" ...
'Tain quoi,z'êtes tarés vous:
moi je vois un type qui s'approche d'une école avec une ceinture d'explosifs autour de lui,je me jette dessus et on saute ensemble!
On ne touche pas aux enfants,ni aux personnes d'ailleurs!
Oh merde,non,ma religion est une religion de haine,pourquoi j'ai dis ça moi????
Un saint ne s'adonnerait jamais à la torture. Même au prix de la vie d'innocents. Le tortionnaire lui-même a conscience, intuitivement, intimement, que ce qu'il fait est mal, et c'est là le signe qu'il n'agit pas selon le Bien. Et le fait de se répéter qu'il agit pour une bonne cause ne suffit souvent pas à apaiser sa conscience : je vous renvoie à l'excellent film Prisoners de Denis Villeneuve.
Cela étant dit, nul n'est tenu d'être un saint.
Mais si l'on commence à autoriser la torture, quelles en seront les limites ? C'est une question semi-rhétorique.
Il n'y a pas de bonne réponse dans tous les cas on est des monstres.
Monstre toi-même,espèce de gremlin....
Le problème que ça me pose est de savoir à partir de quel moment une cause vaut que l'on torture.
A partir de combien de vies potentiellement secourables doit-on perdre toute humanité?
C'est vraiment compliqué, je trouve.
Soyons utilitaristes
Puis déjà : define torture. Psychologique, physique ? De longues séances ou bien tu tires juste une balle dans le genou pour le faire parler ? Faut définir ce qu'on entend par torture.
Areph n'a raison que si l'on essaye de calculer, dans une logique utilitariste, le moindre mal. Effectivement, dans ce cas, quoi qu'on fasse, nous sommes des salauds. C'est pour ça qu'il convient d'embrener comme il faut tout ce qu'ont pu dire les philosophes anglo-saxons sur ces pseudos "ethical conundrums".
Mais à partir du moment où l'on fixe une morale absolue, comme le fait Kant, alors celui qui agit selon le Bien ne peut être traité de monstre qu'injustement. Parce qu'il a la métaphysique de son côté.
Je ne sais pas pour vous, mais je ne suis pas un saint.
Donc, maintenant que j'ai ma place réservée en enfer, je suis libre d'exercer un moindre mal. Mais si on parle de mal, c'est qu'on part du principe que le bien existe, on peut donc faire le mal pour le bien.
Si on retire les conneries des moralistes, on peut simplement rappeler que rien n'est noir ou blanc, s'il faut torturer un connard pour sauver ses victimes ... ça se résume à la problématique du bourreau, de l'exécuteur. Le tout étant de ne pas regarder trop longtemps l'abîme, comme disait l'autre.
Encore faut-il avoir un tortionnaire sous la main. Tout le monde n'est pas capable d'énucléer un œil ou de dépecer un homme qui hurle à la mort...
Je ne sais pas pour vous, mais je ne suis pas un saint.
Et nul ne te demande de l'être.
Si on retire les conneries des moralistes, on peut simplement rappeler que rien n'est noir ou blanc
Rappeler ? Ne commence pas à en parler comme si c'était une vérité évidente. On a la philosophie qu'on mérite, ce n'est pas ma faute si ton monde est tout gris. Cela dépend de ta vision de la morale, comme je l'ai dit : si tu lies celle-ci à une métaphysique, alors il n'y a pas de gris (noblesse oblige). Si par contre tu la sépares de la métaphysique, alors tu tombes soit dans le sophisme, soit dans le nihilisme, soit dans l'utilitarisme, et dans tous les cas, quoi que tu fasses, tu es un salaud.
s'il faut torturer un connard pour sauver ses victimes ... ça se résume à la problématique du bourreau, de l'exécuteur. Le tout étant de ne pas regarder trop longtemps l'abîme, comme disait l'autre.
Sauf signes contraires évidents, comment peux-tu être sûr que le mec en face de toi est un connard et non pas un idiot utile qu'on manipule, ou bien un pauvre gars qui s'est trouvé au mauvais endroit au mauvais moment ? Si tu le tortures et qu'il s'avère être innocent, ce sera toi le connard, indépendamment de tes bonnes intentions.
shayde09 > Pour le sophisme, je ne vois pas, pour le nihilisme non plus, par contre, mais je suis ok pour l'utilitarisme.
Ce n'est pas de ma faute si mon monde est gris, mais je pense que c'est de la tienne si le tiens est blanc ou noir ... mais je doute qu'il le soit vraiment.
"Sauf signes contraires évidents, comment peux-tu être sûr que le mec en face de toi est un connard et non pas un idiot utile qu'on manipule"
Oui, s'il n'y a pas de signes contraires évidents, on ne peut pas être sûr, on est bloqué. Mais parfois il y a des signes contraires évidents, dans ce cas, tu es ok pour oublier ta morale et agir en conséquent ? Ça ressemble aux arguments échangés au sujet de la peine de mort.
"Si tu le tortures et qu'il s'avère être innocent, ce sera toi le connard, indépendamment de tes bonnes intentions."
Je suis un connard, et pas un saint je le répète, ce qui n'exclurait pas d'être quand même un connard d'ailleurs. Si être un connard c'est vivre dans la réalité, ainsi va la vie.
Je suis déçu, je pensais que tu allais répondre en mettant mes phrases
en mode citation, comme ça
Mais parfois il y a des signes contraires évidents, dans ce cas, tu es ok pour oublier ta morale et agir en conséquent ?
Même en cas de signes contraires évidents, il me serait moralement intolérable de destituer aussi barbarement un homme de sa dignité physique, fût-il le dernier des salauds. Parce que Kant, d'abord ; ensuite, parce que toute l'eau du monde ne pourra laver son sang sur mes mains.
Si être un connard c'est vivre dans la réalité, ainsi va la vie.
C'est pour ça qu'on a besoin de métaphysique et de sublime dans ce monde de brutes.
(Je sais qu'il faudrait que je développe plus, mais la flemme)
Décider, au nom de principes moraux supérieurs, de ne pas torturer un homme quel qu'il soit et quelles qu'en soient les conséquences, c'est sublime je trouve.
Et puis, si le maintien de l'ordre et de la sécurité d'une population doit passer par un travail aussi sale et incertain que la torture (car il n'est pas dit que le torturé parle : dignité et grandeur du silence, même chez le salaud -- le pourcentage de gens qui parlent est beaucoup plus faible qu'on ne le pense, cf le dernier rapport du Sénat américain sur le sujet), c'est que
1) cette sécurité, métaphysiquement parlant, ne vaut pas grand chose, mais ça à la rigueur on s'en fout
et surtout
2) l'Etat doit revoir sérieusement ses méthodes pour protéger sa population
Au fait, si [jesuispartout] ou le modo passent par là, peut-être pourront-ils répondre à cette question :
Pensez-vous que l'on puisse faire de Kant, en fin de compte, un métaphysicien ? Le ciel étoilé et la loi morale en lui, ça me paraît pas mal en terme de sentiment d'absolu.
Le problème c'est que là le tortionnaire sait que son acte va éviter la mort de plusieurs enfants.
Moi je veux bien jouer à la roulette russe si je sais à l'avance que je vais gagner.
Sauf qu'on ne le sait pas