Un jour, un poème.

1) La soupe à la casserole

Tu écoute du Miossec, je regarde du Kubrick,
J’aime me cultiver tous les jours,
Je range les assiettes, je lis des rubriques
Un été sur deux je vais à Dour
J’adore les festivals et l’ambiance délétère
Qui règne dans ces bals ou tourne la terre
Quand j’arpente les ruelles,
En quête d’édifice,
Tel Pantagruel je cède aux caprices
Je m’immisce dans les ruisseaux
J’arrose les rosiers
Je plonge dans le cerceau,
Sans vouloir être grossier.
Et dans le tintamarre des casseroles et des questions,
Je déguste une profiterole et une soupe à l’oignon.
Foire à la saucisse, amertume dans un détroit sombre,
Mon verbe doucement glisse, comme un large concombre.

2) Volatilité

Cependant que je colmatai une brèche
A deux doigts de la cambrousse
J’aperçus une nana rêche
Faisant la queue au Crous
C’était une étudiante, un peu patibulaire
Au passé tourmenté, aux longs auriculaires
J’ai vu direct que ça ne collerait pas,
Ces choses-là se sentent
Je suis donc retourné sur mes pas,
J’ai descendu la pente.
Il y avait une file d’attente,
Facile comme un trottoir,
Ornée de nid de poule,
Et autres gallinacés,
J’aime ces volatiles
Et leurs ailes graciles.

3) Requiem pour un portugais

Je ne sais pas si je vous ai dit,
Mais j’ai quand même un problème,
Avec tout ce qui sort de l’extraordinaire.
Dès que ça concerne le réel je m’en fiche.
Pourtant j’apprends, je fais des fiches.
Bien trop poilu, je me défriche,
Sous l’œil effarouché d’un pote imberbe
Qui a soit dit passant des couilles très lisses,
Et qui s’en vante,
Mais il ne trompe personne,
Tout le monde sait qu’il est blasé,
Tout le monde sait que son produit est basé,
Il a essayé un truc chimique,
Il voulait que ça pousse,
Mais ça lui a coupé la chique,
Il est malade, il tousse.
« Je vous donne deux semaines ! »
S’exclame son généraliste,
Alors il hésite à se jeter dans la Seine,
C’est l’un des trucs sur sa liste des choses à faire…
Avant de mourir.

4) Tuyau de Poêle

J’arrose les plantes de mes parents,
Parce qu’ils refont la haie.
Je me suis porté garant
De leur bonne santé,
Le tuyau est amusant,
Je ne m’attendais pas à prendre autant de plaisir,
Tout à l’heure avec le voisin on s’est tapé un délire,
On s’est arrosé, retranché dans nos bases respectives
On a philosophé sur la rafle du Vel d’hiv,
Evidemment ça a cassé l’ambiance,
Je ne lui ai pas proposé de merguez si c’est à ça que tu penses,
Pour moi le barbeuk c’est un truc intime,
Qu’on se permet dans les milieux autorisés
Au loin j’entends le souffle d’un véhicule motorisé,
Sans doute une voiture, hein, c’est courant de nos jours,
Et j’attends que mon pote arrive.
Les braises sont molles, je les ravive,
Je souffle dessus comme pour l’éteindre,
Mais ça fait l’effet inverse,
C’est dingue,
Comme si les feux de forêt se déclaraient
Lorsque des grosses averses,
Il y a des choses qu’on explique pas,
J’aurai dû être bon en maths,
J’aurai pondu théorème sur théorème,
Pythagore aurait voulu ma peau,
Stephen Hawkings on saurait même pas qui c’est
Archimède dirait sans doute qu’il faut pas pousser,
Mais avec le voisin on n’a pas parlé de ça,
Lui il travaille dans une entreprise pour les ascenseurs,
Il écoute du Otis Redding et il invite sa sœur,
Pour faire un brin de causette.

5) Encore 6 heures

En descendant on fait le point
Dans l’ascenseur on serre les dents
On se détend à brûle pour poings
On ne fait pas le ramadan
C’est infernal, tous ces appels
Et ces dossiers qui s’entassent,
On fait l’ménage, on s’fait la belle
Plus que 6 heures et on s’casse ;
C’est sûr c’est tôt pour prendre une pause
C’est bien trop tôt pour prendre une dose,
L’un me donne les coordonnées de son psychiatre,
L’autre me conseille une semaine de break
On ne descend jamais à plus de quatre
Sinon ça part en prise de bec,
« Si on allait bouffer au grec,
Ou quelque chose de consistant, »
Une pensée pour tous ces mecs,
Morts sur le sol d’Afghanistan,
Soldat ou taliban, tous à la même enseigne,
Pour se coiffer il faut un peigne
Pour maigrir, du pain de seigle
Pas de gluten, on digère mal
Soraya me dis que c’est halal.

J'aime bien, ça passe sans trop accrocher l'oreille. Mais ça ressemble à un pur exercice, sans réel fond derrière.

Du coup, la saveur est artificielle et je reste sur ma faim.

Mdr pour celle sur le portugais, sale histoire. Me demande bien d'où elle sort.

Salut Veinnes, merci pour ta lecture.
Si tu veux savoir, ce sont des poèmes grattés au boulot, entre deux dossiers.
Ce sont des tranches de vie, inspirées de mon vécu, des gens que je rencontre et de mon quotidien en tant que salarié du tertiaire... le tout dans une veine surréaliste et instinctive.

Il y a quand même un fond, que tu sauras, je l'espère, découvrir au fil des poèmes

6) BBW

J’suis avec deux BBW dans une BMW,
La caisse à ras du sol on va te soulever,
Mes types obèses plient vos chaises
Leur peau épaisse résiste aux braises,
( Ouais )
Mes gras du bide sont dans le secteur
Je dévore Ovide, je suis un gros lecteur
Ces mecs-là, mecton, c’est des acteurs
J’adore aller dans ma bibliothèque
J’y suis à l’aise comme en discothèque,
Avec un supplément frite,
A l’aise comme avec plein de fric,
Avec le cerveau en friche,
Je me rappelle de l’Afrique,
Jamais allé, mais j’ai des souvenirs
J’ai plusieurs bibendum pour me soutenir
(Ouais)
Mes marcassins sont dans la chaloupe,
J’écoute du Brassens, ce n’est pas un scoop
J’suis pas un ancien, j’suis pas un boyscout.

7) Valderamma
J’ai le cafard comme Kafka
Ça crame dans ma carafe,
J’me carapate, dans le quartier,
A la recherche d’un Carapuce.
Je n’aime pas ces petits monstres,
Ceux qu’on enferme dans des boules,
C’est un peu du braconnage,
Ça j’y pense quand je démoule,
C’est d’ailleurs à ce moment,
Quand je pousse,
Qu’un souffle bien clément,
Me caresse la frimousse.
Je lis des Boule et Bill,
Ou des Télérama
Me remémore les gestes subtils
De Carlos Valderamma
Il n’a pas eu la carrière qu’il méritait
Il aurait dû percer en Europe
Mais pour dire vrai, en vérité,
Je m’en frictionne les escalopes,
J’ai d’autres mondes à prophétiser
Je n’ai pas besoin de périscope

8) Sport de boules

Ils sont sur mon buffet
Je les oublie tout le temps
J’ai tout vu, tout fait
Même la troisième mi-temps
J’ai vu les douches et les équipes
En folie après la victoire
Quand elle me touche, j’enlève mes fripes
C’est pareil tous les soirs
A la fenêtre de mon enfance
Je vois bien que rien n’a changé
Cependant tout est pareil
Je ne veux pas déranger
La farandole des abeilles
Je me constipe, je le confesse
L’air crispé, je retiens l’hôtesse
Elle se met à crier,
Sa main sur la gueule
La mienne sur la sienne
Je ne suis plus tout seul
Dans la mer caspienne,
Mais qu’à cela me tienne,
Ils sont dans le TOP 100 ?
Je serais dans le top ten,
J’me rappelle Tien An Men
Et les balles qui manient la foule
Au bowling, je suis invincible,
C’est vrai que j’aime les sports de boule
J’ai toujours aimé le sport
Mais j’ai gardé mes distances,
Cependant ces derniers temps,
Je pratique avec une certaine insistance
La pétanque, je l’ai déjà dit je pense
J’ai peut-être trouvé ma voie
C’est un peu tard, ça ne fait pas sens,
Et j’en ai conscience
Mes adversaires me dévisagent,
Non sans concupiscence.

9) L’homme invisible

Si je serais l’homme invisible,
Personne ne me verra,
Je serais là et pas là
Je materai sous vos draps
Je vous chatouillerai sous les bras
Je pourrais faire des fautes,
Sans que personne ne vitupère
J’aurais vraiment une vie supère
Je sortirai que vêtu d’un chapeau
J’en ai sous le capot
Peut-être mettrai-je une cape
Y en a dans les soupapes
Je lirais des sourates
On me prendrait pour un djinn
Plus besoin de mettre un slip,
Je ne serais pas un chic type
Je revendrais tous mes jeans
J’irai au Gabon et en Chine
J’irai au musée gratos,
En pleine semaine
La dolce vita
Je vous éviterez
Au coin des ruelles
Je cambriolerai Patrick Bruel
Et Enrico Macias
Enfin je pratiquerai le nudisme
A découvert,
Et sans ambages.