Bonjour,
Je lis souvent des éloges sur ce classique de la littérature française. Il est souvent recommandé sur jvc.
Malheureusement après plusieurs essais je le trouve vraiment pas facile à lire et j'aimerais savoir si cela est quelque chose de "normal" de trouver ce bouquin difficile à lire
Pour opposer un peu cette année j'ai lu le joueur d'échec et le comte de Monte Cristo avec grand plaisir et très facilement. J'ai encore tout en tête des semaines /mois après la lecture. Mais avec Céline c'est pas le cas.
Est-ce que Céline est réputé exigeant et devrais je donc passer par une phase de lecture intermédiaire pour être capable de lire Céline avec moins de difficulté ?
Je pense que c'est plutôt une question de sensibilité, parce que le Voyage a précisément cela d'intéressant qu'il sait plaire, grâce à sa forme atypique, à des gens qui ne lisent pas.
Si le rythme très heurté de la syntaxe oralisante te branche pas d'emblée, oui t'auras besoin d'un temps avant de parvenir à placer ton souffle de manière harmonieuse au sein de cette forme-là.
Zweig sur le plan stylistique, en traduction tout du moins, c'est très plat, sans nuance péjorative puisque c'est volontaire, c'est nu et la lecture progresse plutôt insinueusement par des traits énonciatifs de dérision discrets et par le symbole. Dumas c'est du gros pâté, la langue est simple et descriptive pour un style qui vise la figuration immédiate et dynamique.
Céline c'est plutôt le rendu d'une voix.
Je me souviens avoir galéré pendant la première centaine de pages, puis après ça a bien passé, très bien, même.
Pourtant la première centaine de page est la meilleure partie du livre. Le rythme s'épuise après son retour d' Amérique pour finalement nous offrir un dénouement grandiose de par le cynisme et le nihilisme qu'elle inspire.
J'aimerais beaucoup qu'une société de production comme HBO entreprenne une mini série du Voyage. Comme l'avait dit Soral, il est impossible de retranscrire fidèlement une telle œuvre par un film de 2-3 heures. Une mini série de 10 épisodes d'1 heure chacun en revanche pourrait parfaitement faire l'affaire.
Je comprends ton avis l'auteur, je suis dans le même cas que toi. D'autant plus que je ne sais pour quelle raison j'ai eu vraiment du mal à rentrer dans l'histoire. J'ai lu quelques pages pour ensuite abandonner mais je pense recommencer le livre un jour tout de même.
Pourtant la première centaine de page est la meilleure partie du livre.
C'est plus le style que j'ai trouvé un peu hard au début que l'histoire.
-Tu es cultivé ?
-Oui, je n'ai pas lu entièrement le Voyage de Céline
Oui, c'est normal. Je vais peut-être passer pour un elitrash, mais c'est à ça qu'on voit que c'est un des plus grands livres de notre littérature. Ce n'est pas écrit pour l'histoire. Céline n'a rien à foutre de l'histoire. Il n'y a pas de réel fil directeur à l'intrigue, à l'exception du cynisme de Bardamu. Ce qui compte, c'est le style.
Chaque phrase est travaillée dans son rythme et sa structure.
Le Voyage n'est pas un livre qu'on peut consommer bêtement comme tant d'ouvrages. Il faut se concentrer pour saisir chaque parcelle du style et du travail de Céline. C'est le genre de lecture qui demande de l'investissement de la part du lecteur, et c'est pour ce n'est pas aisé. Mais les efforts valent largement le coup, parce que oui, ce n'est pas facile, mais c'est à raison, puisque le Voyage n'est pas non plus un vomi prétentieux, pompeux et faussement riche comme on en trouve également beaucoup ; non, la richesse n'est pas feinte, elle ne vient pas de l'ego surdimensionné de l'auteur, mais d'un travail perpétuel et palpable par le lecteur.
Pour faire simple, concernant cette déclaration d'amour, j'aurais tendance à répondre à chaque phrase avec une négation par "si, un peu quand même", et à chaque phrase affirmative par "oui mais" ou "faut pas pousser".
C'est aussi que c'est un peu ironique (et ridicule) de présenter le lecteur de Camus comme un intellectuel héroïque, quand on sait tout le bien qu'en pensait l'intéressé (des héros et des intellectuels)
Facile à lire je confirme. Par contre c'est légèrement long
Facile à lire, mais l'histoire est vraiment chiante, j'en suis à la page 150 et c'est ennuyant au possible.
Le style est bon, sans être fou, n'en déplaise aux puristes qui sacralisent l'oeuvre.
C'est son moins bon à mon humble avis. Guignol's Band, Féérie pour une autre fois ou D'un Chateau l'Autre sont ses plus grandes œuvres. Je sais que certains aiment Nord ici, pas mon préféré non plus mais il faudrait que je me le refasse un jour.
Je n'ai aucun problème pour lire ce lire, bien au contraire, je le trouve extrêmement simple.
Le 05 novembre 2020 à 16:08:07 Tonitruel a écrit :
Le 05 novembre 2020 à 09:56:23 Aldau a écrit :
Facile à lire, mais l'histoire est vraiment chiante, j'en suis à la page 150 et c'est ennuyant au possible.
Le style est bon, sans être fou, n'en déplaise aux puristes qui sacralisent l'oeuvre.Le style est impeccable ; je rejoins aisément les puristes sur ce point et te donne volontiers tort. Quand bien même je suis d'accord avec ta première assertion (le livre peut paraître bien ennuyeux, répétitif, le message peut sembler caduque, etc.), ce n'est pas le style qui me semble poser problème.
Pourrais-tu développer ta critique parce que ton avis me semble bien plus crâneur que confiant ? Je serais vraiment ravi de lire des réflexions objectives ou subjectives sur ta vision du style de Céline dans ce roman.
J'avais l'impression que son style faisait consensus en littérature.
Loin de moi l'idée d'être crâneur. Comme je l'ai dit, objectivement le style est bon (ce n'est pas une critique de dire d'un style qu'il est bon). J'apprécie son style, c'est agréable à lire mais je ne l'ai pas trouvé transcendant, d'où mon "bon" et non un "impeccable". Toutefois, je n'ai lu que 150 pages du livre, sûrement que le style se construit et se développe tout au long du bouquin, dans ce cas je reverrai avec plaisir ma "critique".
Qu'est-ce qu'un puriste?
Pour le reste, je conseille également Mort à crédit (que je préfère au voyage): là c'est son enfance et ça se lit, je trouve, bien mieux.
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Pour ajouter au débat, des citations à comparaître:
" Qu'importe mon livre ? [Voyage au bout de la nuit] Ce n'est pas de la littérature. Alors ? C'est de la vie, la vie telle qu'elle se présente. La misère humaine me bouleverse, qu'elle soit physique ou morale. Elle a toujours existé, d'accord ; mais dans le temps on l'offrait à un dieu, n'importe lequel. Aujourd'hui, dans le monde, il y a des millions de miséreux, et leur détresse ne va plus nulle part. Notre époque, d'ailleurs, est une époque de misère sans art, c'est pitoyable. L'homme est nu, dépouillé de tout, même de sa foi en lui. C'est ça, mon livre. [...] J'ai écrit comme je parle. Cette langue est mon instrument. Vous n'empêcheriez pas un grand musicien de jouer du cornet à piston. Eh bien ! je joue du cornet à piston. Et puis je suis du peuple, du vrai... " Interview avec Pierre-Jean Launay, Paris-Soir, 10 novembre 1932.
" J'ai inventé une langue antibourgeoise qui rentrait ainsi dans mon dessein. Et aussi parce qu'il y a des sentiments que je n'aurais pas trouvés sans elle. " Propos recueillis par Robert de Saint-Jean, La Revue Hebdomadaire, 1933.
" Je ne suis pas un écrivain. Je suis tout ce qu'on voudra excepté un écrivain. Je n'ai pas la prétention d'apporter un message. Non, non et NON. Je vous assure que je ne suis pas dans le coup, dans aucun coup. Je n'ai eu aucune influence sur la génération de la "Drôle de guerre"... J'ai inventé un style, c'est tout ce qu'on peut me reprocher... Je suis un technicien, un styliste, un point c'est tout...
Au diable mes livres et mes tirage. Il m'est arrivé d'écrire ce qui me passait par la tête, mais je ne veux être qu'un simple médecin de banlieue. " Propos recueillis par Madeleine Léger, Semaine du monde, n°89, 23 juillet 1954.
Ma favorite:
" Non l'argot ne se fait pas avec un glossaire, mais avec des images nées de la haine, c'est la haine qui fait l'argot. L'argot est fait pour exprimer les sentiments vrais de la misère, lisez L'Humanité, vous n'y verrez que le charabia d'une doctrine. L'argot est fait pour permettre à l'ouvrier de dire à son patron qu'il déteste : tu vis bien et moi mal, tu m'exploites et roules dans une grosse voiture, je vais te crever... " Propos sur Fernand Trignol et l'argot, Arts, n°605, 6-12 février 1957.
Le 12 juin 2019 à 04:49:22 M_Rollin a écrit :
Je me souviens avoir galéré pendant la première centaine de pages, puis après ça a bien passé, très bien, même.
Pareillement. Sans doute le temps de s'imprégner de la langue célinienne.
L'auteur, tu peux aussi commencer par Mort à crédit, le style te paraître peut-être même plus accessible pour un premier Céline.