"Lord Dalhousie
J’étais blond, avais les yeux bleus, la veste blanche,
Vivais dans ce pays qui n’était pas le mien,
Et que j’aimais avec passion, au quotidien,
Sous les soleils écrasant des jours qui s´épanchent.
Si vous saviez, l’air hautain, la main sur la hanche :
Un art inconséquent de triste comédien.
La vérité c’est que j’étais seul, sans soutien.
Mon arrogance est une béquille qui flanche.
Ma peau rougie est étrangère à cette terre,
Mais au fond de moi s´est incrustée la poussière
De ce sol éternel, qui berça mon enfance.
Ils avaient du noir dans les yeux et sur les mains,
De l´or aussi au fond de leur coeur. Moi gamin,
Si j´avais pu être des leurs "
De la mancha
"Rouges sont les nuits à l’avenir effacé,
Et écorchés les mains du destin annoncé.
C’est le cœur qui pleure les écrits dépassés,
Ceux du passé, en fin de larmes, renoncé.
Oranges étaient les fleurs de notre candeur,
Et si plaisantes les douceurs de notre ardeur.
Déjà se dessinait l’ombre de nos malheurs,
A la lueur de la pureté de nos cœurs.
Jaunes furent les éclats de notre succès,
Et réunis les miettes de notre espoir.
Pourtant parut la vanité de nos déboires,
Quand survivait l’excellence de nos excès.
Verts seront les fruits des printemps assassinés,
Et pillés les étoiles des âmes bien nées.
Alors pleureront en cascades nos aînés,
Et en chute d’eau votre jeunesse fanée.
Bleues ont été les jours, au présent, animés,
Et chaleureuses les caresses des amants.
Car deux ont été main dans la main à s’aimer,
Sous les regards frémissants de ces vieux romans.
Indigos avaient été les vieux encriers,
Et gravés dans les eaux les écumes rêvées.
Tant avait divagué les esprits déliés,
Par l’amour envolés, et la mort enlevés.
Violette eut alors coulé notre jeunesse,
Parfumant délicatement notre faiblesse.
Enfin nous eûmes laissé dans notre sillage,
Des chevaux indomptables, les divins ravages.
Tel l’arc-en-ciel né de l’averse, l’illusion
Du plus grand désastre aura touché nos destins,
D’une image étincelante. Toujours plus loin,
Et plus belles, les sept futures déceptions.
Mais de notre histoire, par ces couleurs, hantée,
Que tous disent qu’au moins ils auront tout tenté."
De la mancha
"Les chats de la cour des dandys
Sur la terre endormie, ils chaloupent en grâce,
Sont les nostalgiques à l´ardeur révolue,
Les nobles décadents aux gestes farfelus
Qui dédaignent de leur hauteur toute autre race.
Mais dans ces coeurs velléitaires, nulle place
Pour un monde anodin dont ils ne rêvent plus.
Des duels sous mille soleils, qu´ils n´ont que lu,
Hantent leurs doux rêves bercés aux cors de chasses.
Et s’ils se frottent aux gens vulgaires les soirs,
Ils restent solitaires et seuls, en doux noirs,
Symboles de malheur pour de pauvres dormeurs.
Souvent ils plantent leur griffe, triste et chagrine,
Dans les salons mondains, où règnent des charmeurs,
Qu’on appelle dandy, quand les chats nous fascinent."
De la mancha
""Prions mes amis, ce jeune homme est fou,
Amoureux. Il va s’y rompre le cou."
Une fois de plus, les jaloux médisent.
Les inconscients ne voient pas mon sourire,
Ils oublient que l’amour nous fait frémir.
N´importe! Quand je la regarde, assise,
Et les larmes, d´aujourd´hui ou d’hier,
Je les sèche en un instant, suis heureux,
Et voici bien mon unique prière.
Toujours penser à elle, en mots de feu.
Ah, oui ! Elle est belle, a de l´esprit ! Mais
Il y a plus important: ces yeux, qui
M’ont quelques fois regardé. Je rimais,
Et voilà par ton regard je naquis.
…"
De la mancha
"Sonnet du 21 octobre 2006
Assis sur un banc, j’attendais son arrivée,
Le cœur depuis longtemps courbé par le passé,
L’esprit, par les erreurs de mes mœurs, harassé.
Puis le charme de tes pas foula le pavé.
Et Paris, de ces nuits ajournées délavée,
Ouvrit ses présents, à nos âmes pourchassées,
A la vie de nos deux corps faits pour s’enlacer.
Et mes yeux, dans les éclairs de ton bleu, rivés.
Demain ou aujourd’hui ? Les instants de la vie !
Tes lèvres me les ont ravies ! Seule une envie,
A deux. Moi te regardant, toi te retournant.
Je veux voir tes rides et les feuilles de l’automne,
Les fleurs de ta vie, les sourires du printemps,
Et tenir ta main quand le dernier hiver sonne."
De la mancha
"Jadis, j’avais rêvé de bleus sentiers,
Où chanteraient les marins enivrés,
De poussières enchantées sous nos pieds,
D’une robe satin enchevêtrée,
Fils argentés de nos doigts égarés.
Chuchotaient mes pas, et sifflait tes rondes,
En ces blanches nuits. Loin, bien loin du monde,
Des bateaux, au phare urbain, amarrés.
Mais les larmes sont l’unique chemin,
Que nous ne foulerons main dans la main.
Les anges se sont tus. Saints du ciel
Aux cris amers, grues viles et envieuses,
Langues cocufiées emplies de fiel,
Aux robes grises des maisons pieuses.
Mais qui pourra jamais voler l’instant ?
Ni l’aveugle emportement d’une foule,
Ni les brusques gestes des âmes saoules,
Car un jour, toujours conjugua le temps."
De la mancha.