Bonsoir à tous !
Bon, je suis un peu un dinosaure sur ce forum mais même si les années passent, l'écriture continue ! L'été dernier j'étais un peu en dilemme interne, j'avais beaucoup de mal à écrire sur le mode habituel parce que je me forçais plus ou moins consciemment à remplir une page word par texte. Ca rendait non seulement l'exercice difficile parce que du coup la page blanche devenait très intimidante à chaque fois que je voulais prendre le clavier, et je trouvais également qu'au final le texte produit comportait des faiblesses sur certains passages et aurait mérité d'être plus concentré.
Du coup, je me suis mis à écrire des petits trucs en quatre lignes et ma foi, ça a pas mal marché, dans le sens où ça m'a "débloqué".
Je ne sais guère s'il y a des gens qui se souviendront de moi mais si oui j'imagine que vous reconnaîtrez le style. Sinon en deux mots, sachez juste que en général j'écris en me basant beaucoup sur les sons, et que ce que j'écris prend "sens" surtout quand c'est lu à voix haute.
Voilà, je vous poste ça
1.
Le jour J j’ai jamais su jouer dans le jeu, toujours le jeudi les enjoliveurs en joaillerie, juger jauger les gens s’en ravir les gencives,
S’en cogner des claques, s’enquiller de pleins paquets de clopes, trop enclin à s’encrasser la carcasse écris et craque c’est comme
Le bruit de tes bottes quand tu bats du bitume, et d’habitude l’amer à boire à babiller dans l’embarras, aux abords des bars
Agripper le regard en goûtant de grandes gorgées, autant de gravures que j’égarerai dans le gris je gage, mais c’est guère si grave
2.
Tics tacs au nadir étirés ne s’entendent plus tarir les temps, l’été, s’étendre en tirades attendre un tôt ou tard
La pédale au fond du plancher polir filer piler futile, peu s’en faut de se perdre au point de fuite des phares
La statique sur station stoïque a des saveurs d’esthétique sans doute, on constate surtout si on stoppe le regard
Assez zoomé pour savoir viser au rasoir, assez déserts de désirs illusoires, zéros par dizaines hésiter sur le réservoir
3.
Quand j’ai cassé ma chair à m’enticher m’entacher à m’attacher à chaque accroche, faudrait lâcher l’affaire à ce que je sache et je sais faire à souder
Suffit de s’emparer d’un scalpel et s’opérer quelques nerfs, amputer le sentiment s’en séparer en soirée au tournant d’un fossé, pas sorcier sincèrement
Le souci seulement c’est qu’à trop saper, sectionner disséquer de l’émotion ça se met à se faire plaisant grisant, salissant certes mais presque puissant
Ça vous sert des poussières de néant dans les stries de l’iris, des yeux d’acier ça fait scintiller les déserts les soirs d’été, on s’y surprend à savourer
4.
Le retour de l’algorithme au détour des aires d’autoroute, quand j’ai trop maté l’atmosphère troué trop de vide moléculaire
Sérénité tranquillité les tangentes allitérées s’en aller revenir, sans rire j’ai tant donné d’et alors j’me souviens pas m’assouvir
Trop heureux d’étirer les heures errées dans l’erreur, ni trop nitroglycérine de pire en pyrophage de plus en plus haut-le-cœur
Sous les éclairs de lune des aléas d’elles embellifiées au fil du fur et à mesure, noirs ou verts les yeux noisette azur, je suis plus très sûr
5.
Des tours d’horloge sans relâche à reluquer les potentiels possibles, à pourrir dans le ponctuel si pourquoi pas c’est parti pour
La pulsion d’écrire, l’épiderme écorche et la plante crisse au parquet, c’est souvent quand j’ai froid j’efface les freins, frôle l’effroi parfois
Survivance invariance, dérouler des rires pour tapisser du silence c’est surtout du palliatif, on peut y préférer laper dans l’ellipse
Creuser cracher la lumière piocher pour y croiser du nucléaire, à vrai dire entre ça et néant tous les murs sont plutôt blancs
Eh beh... C'est étrange. Tantôt j'trouve que ça a de la gueule, tantôt j'arrive plus du tout à suivre et plus je lis, moins je comprends.
J'ai fait comme t'as conseillé, j'ai lu ça à voix haute. Et sachant que j'articule assez peu, ça a été ardu parfois. Et mon voisin doit me prendre pour un taré mais ça on s'en fout.
Le texte, donc, ou plutôt les textes. J'étais prêt à partir sur une putain d'analyse mais en fait j'me rends compte que j'ai presque rien à dire. C'est dur de commenter ça. Parfois y a un rythme génial qui se glisse, parfois j'arrive même pas à lire. C'est couillu, c'est vrai, et ça doit pas être facile à écrire.
Bon j'sais vraiment pas quoi dire sinon que j'ai aimé parce que c'est quand même bien foutu et parce que c'est osé, original.
Au plaisir de lire d'autres de tes textes
6.
Silence dans les grands arbres, au bout des dents des gens, l’écrit dans les stries dans les crasses de l’esprit, dans les déserts je suis mort à l’envers
Pour un tour de patience j’ai pondéré l’idée dernière la déliquescence, pour un dollar d’oubli dans la négoscience tu peux rafler trois gouttes d’essence
Quand on grille aux feux de mémoire faut-il vraiment défier ses failles, défaire encore les fils délier les fibres à la flamme, voilà le délire au final
Le vide habite le vide, et si tu t’accroches aux acrostiches y’a guère grand chose à graphier, du grain d’atome et du gris à la rigueur, faut bien gratter
7.
Toujours j’émerge émargé, perdure éperdument sans prier un pourquoi, scinde sans ciller sueur ou suie sans lâcher mon sel
Sommeils éveils évidés tout pareil, des secondes en somme, s’imaginer paginer si tout est si pacifié qu’on s’en acidifie
Tout m’est égal dans le dégoût de l’ego, on gagerait qu’on gagne à l’égorger si ce n’était qu’on y sacrifie sa fierté
Mais s’il faut s’en foutre à outrance pour caresser d’la transcendance, faut pas s’en faire on fait toujours une fine affaire
8.
Courir la distance, inhaler la substance ingestion subsistance dans l'indigeste existence, avaler de l'air recracher du silence
Dégoût des uns dédain des autres, désirs dévidés dans les creux de la chair, à s'entrelacer placides à s'entresucer l'acide
Un brin lubrique un rien cynique, des signaux certes dans l'acier des nerfs, souvenirs sous crasse et une année qui passe
Nostalgies voiles et visages, voler parfois des images, les oiseaux en voyage, ses yeux un sourire du soleil dans les virages
C'est très bon.
Le travail sur les sonorités a toujours un je ne sais quoi de fascinant, et ça marche bien avec tes textes.
Il y a un ou deux passages un poil moins fluides, ou qui fonctionnent un peu moins bien. Mais dans l'ensemble, j'ai beaucoup apprécié.
Comme tu l'as dit, le sens prend corps à la lecture à voix haute. Même si c'est bien entendu très particulier, je n'ai pas eu de problèmes avec le sens... Quand je le saisissais bien, c'était parfait, et sinon, les sonorités se suffisent presque à elles-mêmes.
Bravo donc.
Je suis d'arrivée plus récente sur le forum, mais je me souviendrai de toi.
Effectivement le travail sur les sonorités et réussi, seulement, pour moi c'est un demi-travail : En effet, tes phrases sont dénuées de sens, ça ne mène nulle part, et c'est à mon goût problématique. Un texte ne peut pas s'appuyer seulement sur les jeux de mots au sens oral.
Oui, je suis d'accord avec mon VDD, j'ai tendance à me perdre dans les sonorité, et comme les sonorités sont clairement ta priorité, j'ai du mal à m'imaginer quelque chose d'agréable niveau sens.
Néanmoins, j'aime la forme de texte que tu choisis.
Déjà merci à vous quatre d'avoir lu. Oui c'est vrai au niveau de la fluidité générale, il y a certains passages dont je suis parfois moins satisfait.
D'accord aussi sur le fait que niveau sens, c'est souvent très hermétique, et au niveau syntaxique y'a de toute façon pas beaucoup de "sens" . Quand j'écris ces trucs là le "sens" tient plus à des associations de mots qui dépeignent plus ou moins vaguement des ressentis, des impressions et des atmosphères un peu abstraites. J'aime à penser que ça laisse la place à chacun pour trouver son propre sens, mais je prétends pas que ça marche forcément
Bonsoir,
un musicien des mots, moi-même j'aime joué avec ceux-ci dans mes poèmes. Parfois.
Toutefois, cela comporte beaucoup de risque.
"Du coup, je me suis mis à écrire des petits trucs en quatre lignes et ma foi, ça a pas mal marché, dans le sens où ça m'a "débloqué". " Ta méthode explique beaucoup de choses sur le résultat.
Je trouve que la plupart du temps, on sent qu'il s'agit seulement d'un exercice de style qui, en plus, use pour la plupart de l'allitération ou plus simplement de rimes. Et le plus gros problème, c'est que la plupart de tes lignes ont un sens vague et flottant que tu as apparemment cherché.
A mon avis, ce résultat est également obtenu par ta méthode qui est d'écrire à l'humeur comme beaucoup. Peut-être qu'écrire si peu à chaque fois rend les choses décousues...
Enfin, ne t'en fait pas, les remarques que je t'ai faites on peut sûrement me les faire. (Suffit de voir mon poste sur ce forum)
Bonne continuation
Je risque de ne pas paraître très objective, parce que je suis juste tombée littéralement amoureuse de ces petits jeux de style. Je ne me lasse pas de les lire - à voix haute bien sûr. Ils ont quelques choses de farfelu, sans être pour autant dénués de sens ; ils parviennent à être fluides mais saccadés dans le même temps. Quelle sorcellerie est-ce donc ? J'adore.
Moi, je n'en sais rien, c'est physique, ça ne marche pas.
Merci à tous pour vos lectures et critiques.
Après pour être honnête, je peux pas vous répondre "oui je vais essayer de faire plutôt comme ça" parce que j'ai vraiment pas beaucoup de contrôle sur ce que je fais. J'ai pas vraiment l'impression d'être maître de mon écriture si vous voyez ce que je veux dire, ça sort comme ça
Le dernier en date pour ceux que ça intéresse.
9.
Marcher statique, robotique erratique stoique, calme et chaos karmique, organique agonie l'harmonie, l'arme atonique
Dilution des illusions désolation, distanciation isolation, dealer des lignes d'ailleurs en asil à toute heure, en exilexomil
Ironuits insomnuits, s'effacer sous l'affaissement, défiler ses filets, effaré les phares égarés hagard, par hasard ou parasite
Décrire écrire, lire et délire, folicules folilas, simples équations si solitude est solution, dix inconnues dissolution
Pfou...
Aucune poèsie dans tout ça, débloquage peut-être, mais sens, surtout pas, même lu à haute voix... Je trouve juste ça sans intérêt, placer des mots comme ça, ouais, mais non en fait.
Ca peut paraître bien comme ça, au début, mais il se trouve ue ça ne l'est pas. Là, je suis réaliste, rien d'autre. Je n'aime ces choses, si elles ont servies à te débloquer, tant mieux pour toi. C'esr vrai que ça sonne bien, mais j'aurais préféré que ça ne sonne pas, et que ça ait un sens.
Je me dois de m'inscrire en faux contre ton jugement, Habi, parce que je ne suis pas d'accord.
La poésie, ce n'est pas aligner des alexandrins fluides au kilomètres. En tout cas, pas *forcément*.
Tant que l'harmonie du son est là, ce peut être de la poésie. Contemporaine, certes, mais tout de même. Je suis quelqu'un qui aime quand le fond et la forme sont bien accordés. Ici, tout est sur la forme, le sens est peu présent, et pourtant ça ne me dérange aucunement.
Parce qu'il faut prendre ces petites pièces pour ce qu'elles sont : des fragments qui répètent, concassent, malaxent le son et qui, à mon sens, essaient d'en tirer l'essence. Là est leur intérêt : parfois, les mots sont une musique, et explorer cela me paraît intéressant.
En plus, même avec peu de sens, il y a une ambiance, un décor qui s'installent.
Si tu pouvais donc nuancer un peu tes affirmations péremptoires ("aucune poésie dans tout ça", "ça ne l'est pas") et essayer de les étayer avec autre chose qu'un "je n'aime pas", ce serait agréable.
Wou, y peut me faire changer d'avis, à ce rythme là !
Ce qui m'a gêné principalement, c'est le sens qui manque, la cohérence.
J'avoue que j'ai pas été très agréable sur le coup, j'étais pas dans un bon jour (^^).
J'avoue qu'il y a une dimension poètique dans tout ça, mais... Pour moi ça reste quelque chose de très approximatif et de très viscerale. Je n'ai rien contre ce qui est visceral, je n'ai absolument rien contre l'idée de sortir des sons et des idées comme elles viennent, mais je reste plus dans une quête de sens dans tout ça.
Bon, bah, voilààààààààààààà...
Ça c'est une meilleure critique, déjà
Je trouve que ces pièces se rapprochent de l'esprit de la fatrasie : http://fr.wikipedia.org/wiki/Fatrasie
Merci pour vos critiques tous les deux. Je comprends bien ce que tu veux dire Habiatio. A mes yeux (et les yeux de l'auteur sont rarement objectifs) il y a un sens, seulement c'est un sens beaucoup plus "impressionniste" que syntaxique, et forcément c'est parfois ténu voire opaque, ça je ne le nie pas.
Anyways...
10.
Succintes successions sections subsections dissection, l'insolence des secondes en séquence, ici, maintenance,
Diffuses fréquences, distants instants d'instinct dans l'indistinct, en fin des comptes au fond des temps, riens, béances,
Ecarter les côtés les côtes écartelées, écrire équarrer des vers en équerre, écoeure, ampute, esseule exécute l'excédentaire
J'étais là, j'étais laid dans l'entrelacs, j'étirais mes traits j'ai tracé mes croix, j'en tire pas plus d'ivresse que j'ai d'émoi
Oh, y a vraiment pas de quoi m'remercier, j'aime bien critiquer. D'ailleurs, si je critique ton texte, c'est que je lui trouve un intérêt, sinon je ne le ferais pas.
Le style, c'est du Céline, non ?
En tout cas c'est intelligemment écrit.