Une nappe sonore mêlant avec ambiguïté la houle des vagues et le bruissement des feuillages environnants. On ouvre les yeux, on se lève, et l'on découvre une forêt noire et brumeuse, comme perdue dans les limbes. De cet incipit vidéoludique naît l'un des plus beaux jeux indépendants jamais créés : Limbo.
Conçu depuis 2004 par Arnt Jensen, directeur artistique s'étant émancipé du studio Io Interactive, Limbo tape dans l'œil de Dino Patti, avec qui il fonde le studio danois indépendant Playdead en 2006. Après du R&D (recherche et développement) intensif durant des années, le projet voit finalement le jour lors du Summer of Arcade 2010 sur Xbox 360. Il sort un an plus tard sur PSN, PC et en version boîte Xbox 360, en bundle avec Splosion Man et Trials HD. Une version Mac est aussi en chantier pour une sortie fin 2011. Le succès critique du jeu est unanime, et Limbo multiplie les prix et récompenses. Le jeu reçoit le prix de l'art visuel et de l'excellence technique à l'IGF 2011, le prix du meilleur design visuel, du meilleur jeu indépendant et du jeu de l'année au Milthon (festival européen du jeu vidéo) 2010, et le prix de l'art visuel au Game Developer Choice.
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Concrètement, Limbo est un jeu de réflexion/plates-formes. Se déroulant sur un plan 2D, il nous fait suivre les pérégrinations d'un jeune garçon, qui, si l'on en croit une certaine scène du jeu, part à la recherche de sa sœur. Basée sur la vile mécanique du « die and retry » (meurt et essai encore), la progression de Limbo ne se fait que si l'on parvient à déjouer les innombrables pièges qui jonchent la route des lugubres terres désolées. Pour cela, il faut interagir avec le moindre élément du décor à notre portée, que ce soit un objet, un être vivant, ou même un cadavre. Sombre, gore, parfois cruel, Limbo l'est assurément. Principalement en raison du contraste existant entre le petit garçon et le monde impitoyable dans lequel il se trouve, qui rongerait avec indifférence l'innocence d'un marmot. L'atmosphère participe tout autant à construire le caractère oppressant du jeu : une patte graphique en ombres chinoises uniquement composée de noir et blanc nacrés, ainsi que d'un grain « vieille pellicule » ; aucune musique, seulement des sons sourds qui nous casseraient presque les oreilles.
Limbo nous offre de plus un univers relativement nouveau et effrayant qui oscille entre l'horreur et le post apocalyptique pour sa seconde partie. Mais en fin de compte, c'est surtout dans sa narration, uniquement visuelle, et dans sa façon intense de traiter l'interactivité, que se trouve le nectar de son génie. Certains passages seront devenus cultes, qu'il s'agisse de la courte mais poétique navigation à bord du bateau ou de la traumatisante araignée géante à dépecer, ils témoignent tous d'une cohérence et d'une symbiose rares entre le gameplay et l'univers. En cela, le soft de Playdead est bel et bien une exception parmi les exceptions.
Tel une prison, le silence de Limbo étouffe