Une chose est sûre, Child of Eden est autant un plaisir pour les oreilles que pour les yeux. Bourré d'ondes positives et d'optimisme, le titre abonde en effets visuels lumineux, brillants, et éclatants. Pour le coup, il en ressort une véritable impression de purification lors notamment des tirs octolock, ce qui colle parfaitement avec l'esprit du jeu volontairement privé d'une quelconque once de violence. Néanmoins, ceci n'empêche pas le rendu visuel global de parfois tomber dans la surenchère, tellement les effets psychédéliques fusent de partout. Sans compter les arrière-plans spatiaux qui se meuvent sans cesse devant nos yeux ébahis, autant dire que les épileptiques feraient mieux d'y penser à deux fois avant de tenter l'expérience. On est bien là devant une production japonaise qui respecte la tradition !

Parallèlement, c'est en termes de direction artistique que Child of Eden impressionne. S'il conserve l'aspect tendancieusement abstrait des formes géométriques de Rez, il s'aventure surtout dans le domaine du figuralisme et du naturalisme. Effectivement, la majeure partie des formes physiques du jeu représente des animaux marins, des végétaux, des minéraux, mais aussi des objets mécaniques. L'influence Miyazakienne est bien là et l'on se croirait comme prévu dans le méandre de la mémoire humaine d'Eden. Autrement dit, le jeu nous offre un voyage à travers une représentation imagée de la Terre et de ses entités vivantes. Cette représentation est d'autant plus évidente à la vue de la forme physique la plus remarquable : Lumi, qui symbolise à elle seule la place particulière qu'occupe l'espèce humaine sur la planète Terre.

Quand Child of Eden fait ressentir des émotions fortes, ce n'est pas seulement à travers nos sens auditifs ou visuels, mais aussi tactiles. Contrairement à ce que l'on pourrait croire, le gameplay au pad a toute sa légitimité puisque son utilité première se résume aux vibrations, qui sont exploitées avec bien plus de pertinence que beaucoup d'autres jeux. Concrètement, la manette vibre en rythme avec la musique en s'adaptant au changement de tempo. On ressent donc dans ses mains la pulsation, mais aussi tous les tirs effectués. Même les nuances sont aussi retranscrites en vibrations, plus ou moins fortes selon le volume de la musique. On peut donc dire qu'une telle exploitation du sens tactile dans un jeu vidéo est assez novatrice, et qu'il serait sans doute intéressant que les développeurs divers et variés en tirent d'éventuelles idées. Et qui sait, peut-être vivrons-nous un futur vidéoludique qui éveillera nos sens olfactifs et gustatifs ? Si vous possédez Kinect, des sensations plutôt différentes s'ouvrent à vous. Qualifiée d'expérience « conductrice » par Mizuguchi lors de la promotion du jeu, la reconnaissance de mouvements dans Child of Eden est davantage adaptée pour se détendre et se calmer. Nos gestes étant relativement fluides et posés, une partie s'apparente plus à une danse des bras à la limite de la sensualité, qu'à un défi de scoring hardcore.

Pour conclure, on peut dire que Child of Eden est la preuve vivante que le jeu vidéo se porte bien. A la manière d'un Flower ou d'un Ico, Child of Eden nous conte une histoire touchante, sans pour autant nous noyer sous des masses de dialogues. En usant d'images puissantes, d'une bande-son en crescendo perpétuel et d'un gameplay accrocheur, il nous invite à être en phase avec son concept, et son auteur. Et même s'il est aussi bref qu'une nouvelle sans chute, il demeure d'une intensité sans commune mesure.Il fait avancer le jeu vidéo comme il se doit en faisant se rencontrer interactivité, image, son et story telling moderne avec on ne peut plus de talent. Un petit pas pour l'art, mais un grand pas pour le jeu vidéo ?