L'encre et l'eau mêlées, le peintre chinois agence les souvenirs de cette nature qu'il veut spiritualiser sur papier. Il grave d'abord une épitaphe à l'aide de sinogrammes pour animer son âme. Il faut dire que la peinture et la calligraphie sont intimement liées dans l'ordre artistique chinois, et c'est là tout le propos de Jia Ling sur Nintendo DS, une réalisation étudiante sans doute destinée à représenter le versant le plus lyrique de l'ENJMIN. Jia Ling a cependant sa petite histoire qui commence en 2005 : "Nous avons choisi de continuer un projet présenté en première année : La Légende De Jialing, qui était un jeu développé sur PC avec gamemaker." Commençons donc par présenter cette première ébauche, qui est au reste pourvue d'une démo jouable dont nous vous communiquons le lien à la fin de cette présentation. Jialing est une petite fille faite de timides traits de crayons. Tantôt rieuse, tantôt pleureuse, elle voyage dans un environnement d'estampes entièrement dédiées à la nature, des shan shui huà. Le tableau du gameplay sera succinct. Entièrement gouvernable à la souris, cette juvénile héroïne suit les tracés portés sur le sol par le joueur. Attention ce système n'a rien à voir avec Yoshi Touch And Go, pas plus que Kirky paintbrush, car on y trace un mur que va suivre le personnage toujours en mouvement. La démo propose trois niveaux, trois variations ludiques de difficultés croissantes. Chacun de ces stages est soumis à un timer. Le joueur devra d'abord simplement rallier un point précis, l'arbre de la vie, à l'autre bout de la carte. Il s'agit d'en faire de même par la suite en emmenant dans son sillon le maximum de Lings. Ces êtres magiques sont issus de l'essence naturelle, et vous devez simplement les approcher pour les guider. Enfin, la troisième étape injecte un peu de réflexion dans la recette avec le principe du shifumi. Désormais il y a trois types de Lings : les Sui sont d'eau, les Huo de feu et les Tuo de terre cendrée. Quand les premiers éteignent les seconds, ceux-ci brûlent les troisièmes, qui eux-même assèchent les Sui. Il vous faut dés lors composer votre escorte afin d'optimiser vos transports, même si aucune limite minimum de Lings ne vous ait exigée, sinon sous forme de high scores. Nous avons commencé a développé le concept et le jeu avant la sortie de la DS, et nos références sont plutôt Zelda the minishcap et Pikmin. Ce dernier est effectivement l'un des grand frères les plus manifestes de cette Légende De Jialing qui va se muer, après 6 mois de production à huit personnes, en une version DS d'une remarquable richesse.
Jia Ling supplante l'esquisse de 2005 à tous les niveaux. Visuellement, tous les personnages gagnent en volume et en détails, les crayonnés encrés et tachetés de peu de couleurs des décors deviennent ici des compositions pastels éclatantes, et qui ne renient pourtant jamais leur héritage calligraphique. Cette équilibre est dû à un véritable duo d'artistes complémentaires : L'univers graphique à été développé par les deux graphistes de l'équipe, dont Xanqiu une étudiante chinoise qui est venu en France pour se spécialiser dans le jeu vidéo, c'est elle qui était garante du style graphique traditionnel, Marc l'autre graphiste à lui apporté la touche plus moderne et " manga ". L'animation, aussi, est tout autre, et atteint aisément le niveau de Children Of Mana, se permettant même d'être plus agréable que Contact. Il en va de même pour le travail musical qui creuse une veine plus folkorique et donc plus généreuse tout en préservant la base minimalisme et intimiste de la BO initiale. Mais c'est particulièrement le fond qui a gagné en consistance. Un scénario est rédigé et appuyé par des phases de dialogues avec des PNJ : Jialing parcours le monde à la recherche de sa perle de dragon qu'elle a perdu, et elle apprendra et utilisera la magie grâce aux Lings et au talent de calligraphie du joueur. Le projet est devenu un véritable Action/RPG. Le joueur doit franchir des précipices en reliant ses pans d'un trait, faire de même entre plusieurs plates-formes friables, prendre garde aux pièges mobiles qui zèbrent un couloir étroit, récupérer les Lings pour accroître ses aptitudes magiques. Il pourra par ce détour déclencher des sorts en griffonnant des sinogrammes chinois dans la continuité de ses actions. Ni vu ni connu, le jeu ne cesse ainsi d'être une ouverture et un apprentissage de l'art visuel chinois. Et il est inutile d'essayer plus longtemps de dissimuler les relations thématiques comme ludiques qu'entretient Jia Ling avec le titre qui a peut-être secoué le plus notre rédaction ces derniers temps : l'inénarrable Okami. Quand bien même le lien ne serait pas volontaire, puisque l'équipe de Jialing ne cite pas l'oeuvre de Clover dans ses inspirations, quelle joie de retrouver ainsi de telles intentions communes. Et si la jeune Jia Ling a par instant l'aspect d'un miroir européen d'Amaterasu, ne vous y trompez pas, c'est qu'elle a du caractère la vedette.
Questions à l'équipe de Jia Ling :
jeuxvideo.com > Est-ce que le succès de la maquette PC de l'année précédente vous a complètement mis en confiance sur la viabilité du projet sur DS ?
Pas du tout ! Au contraire, cela nous a mis de la pression. Il fallait faire aussi bien au minimum, or il est très difficile de savoir par avance si un nouveau concept sur une console tout nouvellement sortie qui propose une façon de jouer totalement innovante va fonctionner. C'est même impossible. Mais on peut imaginer que nos idées collent pas mal. Et il faut surtout tester tout ce que l'on fait le plus vite possible.
jeuxvideo.com > Les mots Jia Ling ont-ils une signification ?
Non pas de traduction particulière. C'est surtout d'un point de vue sonore. Mais c'est un vrai prénom chinois.
jeuxvideo.com > Comment avez-vous abordé, techniquement parlant, cette version DS ? Avez-vous effectué des démarches auprès de Nintendo ? Si oui, comment ont-ils réagi ?
Non nous n'avons pas cherché a contacter Nintendo pour la partie technique, nous avons utilisé une architecture disponible sur le net. Il n'est pas possible pour le milieu étudiant d'avoir des kits de développement officiels (ce qui est fort bien compréhensible même si cela est dommage) c'est donc le royaume de la bidouille. Et il faut tirer un grand coup de chapeau aux deux programmeurs qui ont travaillé d'arrache-pied pour faire le moteur de jeu. Ce fut pour eux une sacrée aventure mais une magnifique expérience.
jeuxvideo.com > Comment a été reçue cette version DS auprès du jury de fin d'année ? Avez-vous rempli vos objectifs ?
Nous avons eu plutôt un bon accueil, notamment car nous avons put mettre a disposition du jury un certain nombre de consoles pour tester le jeu dans les vrais conditions.
Et nous avons atteint en tout cas les objectifs que nous nous étions fixés tous ensemble.
Pour télécharger la démo La Légende De Jialing
Trailer HD de Jia Ling
Site officiel de Jia Ling