L’autre élément du développement qui peut influer sur la difficulté concerne l’animation des personnages. Il suffit d’interroger les développeurs ayant œuvré sur des machines des années 1980 ou 1990 pour s’apercevoir que les éditions finales sont en général assez éloignées des prototypes et versions de travail.
Durant les développements, certains titres profitent d’animations très coulées et fluides… qui disparaissent une fois ceux-ci dans le commerce.
Steve Mayles, animateur sur Donkey Kong Country se rappelle :
Il n’y a jamais assez d’espace ! Chris (Nda : Sutherland, programmeur sur DKC) a charcuté mes belles animations en 32 images par seconde en supprimant toutes les étapes d’animation et en ne gardant que les principales.(Rires)
Ce qu'il faut comprendre, c'est que le prototype du jeu proposait des mouvements plus coulés et le feeling était moins « brut » dans la démarche des personnages. On aurait pu donc avoir accès à un gameplay encore plus fluide... si la technique n'avait pas été si limitée. Pour sa défense, Chris Sutherland relate la chose suivante :
Auparavant, les animations étaient réalisées à la main et la limitation dépendait simplement de l’artiste. Ce dernier devait dessiner plusieurs images qui étaient ensuite intégrées au jeu. On pouvait lui dire ‘j’ai besoin d’une autre image’, ou ’j’ai besoin d’une image entre ces deux mouvements.’ Par conséquent, la limitation dépendait vraiment du temps à disposition de l’artiste. Là, les choses étaient différentes, car il s’agissait d’images pré-rendues, et les animateurs pouvaient créer autant d’étapes d’animation qu’ils désiraient. Ainsi, Steve pouvait ajouter des centaines d’images pour animer, par exemple, une séquence de saut. Quand je recevais ça, je ne pouvais pas convertir ses animations en l’état car le saut, aussi bien animé soit-il, pouvait s’étendre sur dix secondes ! (Rires) Pour y remédier, il fallait supprimer des étapes intermédiaires, de façon à ce que l’ensemble des animations puissent être intégrées à la mémoire de la cartouche. Celle de Donkey Kong Country avait beau être importante, on avait toujours un surplus d’images.
Ce n’est évidemment qu’un exemple mais il faut bel et bien prendre en compte que la technique peut influer sur la difficulté et le feeling d’un jeu. Car même un jeu bien réglé sera plus difficile à négocier si le héros principal est droit comme un piquet et n'a que peu de possibilité de mouvements. On trouve ainsi dans les années 1990 de nombreux jeux de plateforme qui souffrent d'une démarche ou de sauts trop statiques du héros. Ils ne sont pas difficiles au premier abord mais les animations sont si raides qu'elles crééent de vrais problèmes de progression.