AMD l’a toujours revendiqué, son architecture Zen dispose d’un avantage majeur par rapport aux précédentes générations de processeurs qu’elle a commercialisées : elle est évolutive. Autrement dit, elle est capable de couvrir tous les besoins en termes de puissance de calcul, des plus faibles aux plus importants, en jouant sur un certain nombre d’éléments communs et sur un dimensionnement de la structure les liants. Et les puces Threadripper en sont une nouvelle démonstration.
Revenons ainsi sur les différents processeurs de la gamme Ryzen. Comme nous l’expliquions dans un précédent dossier, les Ryzen 7 intègrent sur leur die Zeppelin un total de 8 cœurs physiques, organisés par groupe de 4 au sein de blocs nommés CCX (pour CPU Complex). Dans cette structure, chaque cœur dispose de 64 Ko de cache d’instruction L1, 32 Ko de cache L1 de données, et 512 Ko de cache L2. Le cache L3, quant à lui, a la particularité d’être partitionné en 4 modules de 2 Mo : chaque tranche de 2 Mo est rattachée à un cœur, mais les données qu’elle contient resteront accessibles aux autres cœurs si besoin. Enfin, pour assurer la communication entre ces différents systèmes, les ingénieurs d’AMD ont développé une sorte de réseau de communication baptisé Infinity Fabric, qui sera chargé de gérer les échanges de données entre le trio CCX1 - CCX2 - Contrôleur mémoire.
Lorsqu’il a fallu adapter cette organisation aux Ryzen 5 et 3, qui proposaient des configurations 6 ou 4 cœurs, AMD n’a eu qu’à désactiver des unités au sein de ses blocs CCX tout en respectant une certaine symétrie : Les Ryzen 3 sont ainsi structurés autour de 2 CCX de 2 cœurs tandis que les Ryzen 5 reposent sur 2 CCX de 3 cœurs. Ce principe d’évolutivité aura permis à la marque de gagner sur deux tableaux, en réduisant à la fois ses coûts de développement, et en améliorant ses rendements au global, des dies d’une gamme pouvant très bien être reclassés dans une gamme inférieure le cas échéant, s’ils présentaient des unités défectueuses en sortie de chaine.
À partir de là, quid des puces Threadripper qui ne sont plus une déclinaison vers le bas des Ryzen 7, mais une évolution par le haut ? Et bien c’est exactement la même chose. En effet, pour concevoir les puces 1950X et 1920X, AMD n’a eu qu’à coupler deux Die Zeppelin, et à les relier… devinez par quoi ? L’Infinity Fabric. Car c’est finalement toute l’astuce de ce système de transfert de données : il a été conçu pour gérer aussi bien les interactions entre des cœurs, des blocs CCX, des dies voire des sockets, la seule variable d’ajustement restant finalement son dimensionnement dans chaque cas de figure. En l’occurrence, la bande passante allouée pour faire communiquer les deux dies des Threadripper atteindrait 102.22 Go/s, là où celle qui permettait de lier deux blocs CCX sur Ryzen était de 21 Go/s. Au final, on pourrait considérer qu’un Threadripper 1950X se résume à deux Ryzen 7 de la même manière qu’un Threadripper 1920X correspondrait à deux Ryzen 5.
Si l’on s’appuie sur la description volontairement très schématique que nous venons d’en faire, c’est effectivement proche de la réalité. Toutefois, si cette capacité de l’architecture Zen à s’agrandir est très pratique, elle n’en a pas moins un prix sur Threadripper. Chaque die est ainsi relié à ses propres slots DIMM par deux canaux mémoires. Or, il arrivera forcément un moment où un die pourra avoir besoin d’accéder à une donnée stockée sur la RAM de l’autre die, et l’on comprend instinctivement que ce process induira une latence supplémentaire, par rapport à une architecture construite autour d’un seul die Zeppelin. La latence, c’était déjà le talon d’Achille des puces Ryzen. Et malheureusement, il n’y aura pas de solution absolue pour AMD dans ce cas de figure. C’est pour cela que la firme a intégré au sein de Threadripper une dose de flexibilité, que l’on n’avait pas sur Ryzen.
Plus précisément, l’utilisateur aura la possibilité de choisir le mode de gestion mémoire qui lui conviendra le mieux. D’un côté, le mode NUMA pour Non-Unified Memory Architecture permettra au système de choisir l’endroit où stocker une donnée dans une barrette mémoire, en fonction de sa proximité avec le cœur qui doit la traiter. Cette solution ne sera cependant que contextuelle : non seulement elle ne sera pas toujours efficace, mais si elle améliorera la latence dans certains cas, ce sera au détriment de la bande passante, ce qui perturbera les performances sur d’autres usages pour lesquels ce critère là est important. Dans ce cas, l’utilisateur privilégiera le mode de gestion mémoire dit UMA ou local, également disponible, et qui considéra la mémoire disponible comme un tout, améliorant la gestion de la bande passante.
Et ce n’est pas la seule mesure de flexibilité à laquelle AMD a dû se résoudre. Ainsi, avec la gamme Threadripper, la firme entend bien séduire une cible déjà émoustillée par les performances des modèles Ryzen 7 : les joueurs - streamers. Or, certains jeux semblent allergiques aux processeurs présentant autant de cœurs. Un phénomène que nous avons pu nous-mêmes constater, et qui allaient de quelques plantages ponctuels sur Gears of War 4 à de réelles impossibilités de lancer des jeux, comme Deus Ex : Mankind Divided en DX12 ou Far Cry Primal. Pour parer à ces problèmes, AMD a mis en place un mode de fonctionnement baptisé « Game Mode », qui va venir désactiver un die complet. Une puce Threadripper 1950X se comportera alors comme un Ryzen 7, tandis qu’un processeur 1920X recoupera les performances d’un Ryzen 5, cette perte en puissance de calcul s’accompagnant d’un bonus de compatibilité.
Références processeurs | Coeurs / Threads | Fréquence de base | Fréquence Boost > 2C | Fréquence Boost 2C Max | Technologie XFR | TDP (Données AMD) | Prix |
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Ryzen 7 1800X | 8 / 16 | 3,6 GHz | 3,7 GHz | 4,0 GHz | Oui | 95 W | 460€ |
Threadripper 1950X | 16 / 32 | 3,4 GHz | 3,6 GHz | 4,0 GHz | Oui (4,2 GHz) | 180 W | 999€ |
Threadripper 1920X | / 16 | 3,4 GHz | 3,6 GHz | 4,0 GHz | Oui (4,2 GHz) | 180 W | 850€ |
Finalement, nous terminerons ce premier tour d’horizon des puces Threadripper avec un point sur leurs spécifications techniques. Comme on pouvait s’y attendre, elles sont en ligne avec celle des processeurs Ryzen 7 et 5, à un coefficient multiplicateur près. On retrouve également les mêmes paliers de fréquences. On notera cependant que le TDP des nouvelles venues n’enfle pas démesurément, et se trouve même pour le 1950X à 180 Watts, soit moins du double d’un Ryzen 7 1800X.