Véritable séisme dans le petit monde du jeu vidéo, l'arrivée tonitruante de Vivendi, entreprise de Vincent Bolloré, dans le capital d'Ubisoft et de sa compagnie jumelle Gameloft a sans aucun doute dû faire frémir les équipes du petit studio français devenu grand, et pourrait bien remettre à terme en perspective l'approche du jeu vidéo de ce dernier.
Si les frères Guillemot, fondateurs d'Ubisoft ne cessent de marteler que la montée en puissance de l'ogre Vivendi, très en appétit, n'est pas désirée, elle s'avère pourtant inéluctable. Conformément à la volonté de Vincent Bolloré de renforcer son influence sur le secteur du numérique, Vivendi est entré début octobre au capital d'Ubisoft et de Gameloft pour finir par contrôler 10.4% du premier et 10.2% du second à la fin du même mois.
La réaction des Guillemot ne s'est pas faite attendre et ces derniers s'étaient d'ailleurs exprimés dans les Echos pour donner évoquer leur désapprobation :
Nous avons le sentiment d’avoir vécu une agression. Prendre un pourcentage dans notre société sans discuter avec nous au préalable, ce sont des méthodes d’un autre temps. On n’entre pas dans une société en cassant la porte !
Malheureusement, rien ne semble arrêter le géant Vivendi qui petit à petit a resserré l'étau autour de l'entreprise bretonne, pour aujourd'hui détenir 26,69% du capital de Gameloft, assortissant cette ascension d'une déclaration assez peu équivoque.
Ces achats n’ont pas été spécifiquement conçus comme une étape préparatoire à un projet de prise de contrôle de Gameloft ; aucune décision n’a été prise en l’état concernant un éventuel dépôt d’offre publique d’acquisition sur les titres de Gameloft ; au cours des prochains mois, Vivendi entend privilégier une approche constructive permettant d'étudier une collaboration fructueuse pour les deux groupes. Si une telle approche ne se conclut pas favorablement, Vivendi n'exclut pas de prendre le contrôle de Gameloft.
Vivendi est donc le premier actionnaire de Gameloft, devant les Guillemot. Ces investissements d'au moins 300 millions d'euros pour Ubisoft et de 130 millions pourraient paraître colossaux, mais semblent dérisoires face à la trésorerie de Vivendi dont le compteur affiche plus de 9 milliards d'euros.
Difficile de ne pas voir dans cette fulgurante ascension la perspective d'un changement de direction chez Ubisoft et chez Gameloft. L'année 2016 sera donc à surveiller de très près de ce côté, car cet événement pourrait tout à fait modifier l'approche du jeu vidéo de l'entreprise à succès. Si certes les licences phares telles qu'Assassin's Creed ne devraient pas être mises de côté, les projets de moindre envergure, comme ceux que l'on a pu essayer à l'époque de Grow Home, Child of Light ou Mémoire de la Grande Guerre pourraient bien être remisés au placard, en raison de leur axe moins grand public que le reste. Rayman de son côté, pourrait également souffrir de la politique de Vivendi, que l'on sait particulièrement agressive, si l'on en croit les remaniements effectués dans les différents groupes dans lequel il est intervenu.
C'est pour ces raisons que cette affaire, très business de prime abord, est à surveiller de près dans le courant de l'année prochaine, qui devrait déterminer sur les Guillemot parviendront à garder le contrôle de leur entreprise à grand coup de dépenses.