Afro n'a qu'un seul but, venger la mort de son père, tué par un personnage nommé Justice. Dans le monde d'Afro, sorte de Japon post apocalyptique où le clivage entre traditionalisme et modernité est exacerbé, il existe deux sortes de bandeaux. Le premier bandeau fait passer son détenteur pour un guerrier absolu, comparable à un dieu. Le deuxième ne donne qu'un droit, celui d'être le seul à pouvoir attaquer le porteur du premier bandeau. Seulement voilà, là où ça se complique, c'est que le père d'Afro était porteur de l'étoffe suprême. En le tuant, Justice devient naturellement le numéro un. Il va donc falloir qu'Afro s'empare du deuxième bandeau pour accéder à Justice et enfin étancher sa soif de vengeance. Véritable western japonisant où le katana est roi, Afro Samurai combine deux univers que tout oppose, traditionnel nippon et Hip Hop, dans une valse enivrante teintée de perles rouges.

D'un point de vue esthétique, Afro Samurai est une pure merveille. Les graphismes sont cel-shadés juste ce qu'il faut pour rappeler le manga, sans porter atteinte aux proportions des personnages. On retrouve l'ambiance des cinq premiers épisodes des aventures du personnage campé par un Samuel L. Jackson au sommet de son art. Le style blacksploitation confère au titre un côté bougrement sympathique, et l'esprit d'Afro (sorte d'incarnation que l'on appelle en pressant sur un bouton) n'est pas avare en grossièretés délectables avec cette voix aiguë si typique des gangsters black made in Hollywood. Et si les dessins sont soignés, les différents décors sont tout aussi splendides. Afro Samurai est un véritable régal pour les yeux, mais aussi pour les oreilles grâce à la bande-son sélectionnée par RZA du Wu Tang Clan. Une expérience complète qui ravit nos sens avant même que l'on ne touche la manette. Un fait tellement rare de nos jours, que cela mérite d'être signalé.

Pour le gameplay fondamental, le jeu de Bandai Namco verse dans un classicisme certain. Un bouton pour les coups horizontaux, un autre pour les coups verticaux, un pour les coups de pieds et puis un dernier pour les sauts. Jusque-là, rien de bien excitant. Comme tout beat them all qui se respecte, Afro possède sa panoplie de coups à débloquer au fil de l'aventure. Combos, mouvements d'esquive, parades, et même des maniements de katana pour couper des balles en deux, voire les renvoyer à la tronche de vos adversaires. Original, mais le plus intéressant est à venir. Dans Afro Samurai, il est possible de découper ses ennemis exactement comme on le souhaite. Pour ce faire, il suffit d'enclencher le mode « focus » à l'aide d'une touche afin de passer en ralenti façon Max Payne. Puis, on choisit son bouton de coupe (horizontal ou vertical) que l'on maintient enfoncé le temps du choix de l'endroit exact de l'impact de son katana à l'aide du stick analogique et d'une sorte de repère blanc sur sa cible comme un boucher se préparant à trancher joyeusement un jambon. Le sang gicle, on se sent surpuissant et puis on part à l'attaque d'un autre sbire. Parce que des sbires, il y en a une bonne demi-tonne qui vous tomberont dessus dans les onze niveaux que compte le jeu. En tant que détenteur du bandeau numéro 2, vous êtes l'homme à abattre et ça se sent !

Afro Samurai est un jeu qui a du style, et sur lequel les développeurs de Namco Bandai US ont eu les mains totalement libres pour créer le jeu de leurs rêves. Pour preuve, la vision du directeur artistique a été scrupuleusement respectée tout au long du développement. Ainsi, ne vous étonnez pas de l'absence de barre de vie, pour savoir si votre personnage est en bonne santé, il suffit de zieuter si le contour de ses traits est de la couleur originelle ou si ce dernier vire au rouge. Cet effet s'accompagne d'un son de battements de cœur des plus stressants. Pour y remédier, il faudra trouver un ours en peluche (toujours à portée en cas de besoin), un autre clin d'œil à la série animée. Cette absence de repère visuel concernant la santé de votre avatar n'est pas la seule information cruciale qui se trouve masquée. La jauge de concentration qui vous permet de trancher les ennemis, voire de déclencher un véritable carnage pendant trente secondes, est quant à elle symbolisée par le médaillon que porte Afro autour du coup. S'il est noir, il faut patienter encore un peu alors que s'il devient blanc, vous pourrez laisser libre cours à vos pulsions meurtrières les plus inavouables.

Fidèle au look et à l'esprit de la licence, Afro Samurai pourrait devenir une adaptation culte si le rythme de jeu est maintenu sur la dizaine d'heures qu'il faut pour en venir à bout. Ce serait une vraie réussite, d'autant qu'en développant un peu la jeunesse d'Afro sur les premiers niveaux du jeu, ce titre permet de découvrir un pan de l'histoire inédit pour ceux qui ne connaissent le manga de Takashi Okazaki qu'à travers les cinq épisodes de l'animé sortis en DVD.