Il va sans dire qu'un guerrier de l'ombre, affublé d'une tête grosse comme une roue de tracteur perchée sur un corps chétif de 80 centimètres, ne dispose pas d'une crédibilité extatique. Votre tâche sera donc de faire évoluer ce digne représentant de la mode du S.D (Super Deformed), au sein d'une trame scénaristique somme toute originale. En effet, dès l'introduction, après avoir joyeusement décapité et démembré une armée de sbires du mal tout aussi ridicule que vous, vous exécutez votre "sensei" dans votre folie meurtrière. Cette action, aussi brutale qu'humoristique, donne le ton général de cette aventure à consonance loufoque. Continuons petit scarabée.

Reposant sur le principe quasi éculé du beat'em all, I-Ninja offre tout de même son lot de surprises de bon aloi, du moins dans le principe. Possédant un nombre assez restreint de coups, du moins au début, toute votre concentration se focalisera sur trois boutons principaux, déclencheurs de combinaisons intéressantes mais peu variées. Mis à part les mouvements offensifs, le petit être masqué possède bien d'autres capacités. Il peut par exemple voler un petit moment en faisant tournoyer son sabre, s'accrocher à des anneaux avec son grappin, courir à l'horizontale sur des murs verticaux (notez la performance), ainsi que "grinder", tel un Tony Hawk asiatique sur de longues rampes métalliques. Mais ce n'est pas tout. Suite aux nombreux décès perpétrés, apparaît soudainement une icône sur la gauche de l'écran, ressemblant à un katana. Par une simple pression sur la croix directionnelle vers le haut, votre ami l'homme ténébreux et caractériel, deviendra fou de rage et surpuissant. L'animation concernant ces moments-là est d'ailleurs un clin d'oeil à toutes les séries japonaises où la métamorphose fait loi (qui a dit Dragon Ball ?).

Et des références, ce soft en est plein à craquer. Se déroulant dans un univers médiavalo-futuriste, les machines infernales seront légion, alliées de choix à un groupe machiavélique désirant construire une arme surpuissante. Un scénario délibérément à des années-lumière d'une quelconque inventivité, mais disposant d'un traitement frais et intéressant. D'où une variété de situations salvatrices à un fond relativement classique. Entre un combat de boxe aux commandes d'un mecha, pâle copie de Goldorak, et une séquence de tir à vue équipé d'un canon, tentant de freiner l'invasion de votre plage, il semble toujours exister un ersatz à vos pérégrinations violentes. Un système d'évolution par le biais de ceinture de différentes couleurs et de sabres plus ou moins résistants, relatif aux points et bonus récoltés dans chacun des niveaux, se voit également inclus dans la folle partie. Fans de films de kung-fu, les hurlements rageurs du minuscule ninja, vous remémoreront la période bénie de Bruce-Lee. De même, les différentes attitudes du héros participent activement à faire de l'ambiance de ce titre un de ses points forts.

Malgé tout cela, la lassitude ne se dissimule pas loin, et n'attend pour faire surface qu'une défaillance, qu'elle trouvera sûrement en la réalisation. Graphiquement moyennement convaincant, bien que donnant à observer des animations de qualité, et un frame-rate sans accroc, son plus gros écueil vient de la paresse maladive et lunatique des caméras. Autant ces dernières peuvent vous aider lors de passages dignes de Sonic, autant lors de phases de gameplay à la Monkey-Ball, ou simplement de plates-formes, elles se changent en un amas de plans incertains et nuisant à la lisibilité de l'action. Mais la jouabilité instinctive et jouissive permet de rehausser un tant soit peu l'intégrité de l'ensemble. La bande-son quant à elle se montre convaincante. Les compositions musicales importunent légèrement, tandis que les voix anglaises confèrent aux intervenants une réelle dimension. Mention spéciale au héros.

Au final, un petit jeu qui me fait une assez bonne impression. Sans révolutionner le genre, il apporte une petite touche de folie, agrémentée d'idées bienvenues. Gageons que les développeurs remédieront à l'obstacle lié aux caméras, afin de proposer aux joueurs une aventure divertissante bien que réalisée de manière assez sommaire. Le sage dirait à juste titre : "Lorsque la rivière se montre tempétueuse, contemple-la et patiente". Mais il ne connaissait pas les lois du marché.