L'artiste multi-casquettes Philippe Druillet poursuit son adaptation très personnelle de l'anneau de Nibelhungen, le célèbre opéra composé par Wagner. Si le compositeur aura mis plus de vingt ans pour créer son oeuvre, il n'aura fallu que deux malheureux jeux d'Arxel Tribe pour la massacrer entièrement !
Comment peut-on s'enthousiasmer d'apprendre qu'Arxel Tribe donne une suite à Ring ? Après avoir parcouru le premier jeu et découvert ce qu'ils avaient fait de la légende de l'anneau de Nibelhungen, ce n'est pas de gaieté de coeur que l'on se plonge dans cette suite tout aussi indigeste. Bon pour le scénario, on reste dans le trip anneau de pouvoir remis au goût du jour par les longs métrages de Peter Jackson. On sent d'ailleurs qu'Arxel tente un peu de surfer sur cette même vague, mais après tout, le premier volume de Ring est sorti bien avant le film donc on ne peut pas vraiment leur en tenir rigueur. Et puis il y a tellement d'autres points négatifs à souligner que l'on ne va même pas s'attarder à de telles bassesses. Fini les plusieurs personnages à contrôler à tour de rôle comme dans l'épisode précédent, Ring 2 se concentre sur le seul et unique personnage de Siegfried, fruit de l'amour incestueux entre Siegmund et sa soeur Sieglinde (sic). On suit le jeune enfant sur plusieurs périodes de sa vie et dans toutes les épreuves qu'il devra traverser pour accomplir son destin : devenir un héros parmi les siens et provoquer la chute des Dieux pour que l'ère des hommes puisse naître.
Je pense que vous serez d'accord avec moi pour admettre que le propre d'un jeu d'aventure est de raconter une histoire intéressante avec si possible de nombreux casse-tête à résoudre. Avec Ring 2, Arxel Tribe ne semble pas partager la même vision de ce genre de jeux. Bien sûr, à la base la légende de l'anneau est quand même vachement bien, mais le traitement que lui réserve l'éditeur laisse clairement à désirer. Scénario décousu, voire incompréhensible, énigmes soit trop simples soit complètement dépourvues de sens, on finit bien souvent par agir sans savoir pourquoi et au petit bonheur la chance. A moins de déjà posséder de vagues notions de la légende originale, le scénario avance ainsi tout seul en ayant lâchement largué le joueur dès l'introduction et sans prendre soin de l'accompagner tout au long de l'aventure. Ne serait-ce qu'une petite voix-off lors des séquences cinématiques aurait permis de suivre ce qui se passe à l'écran. Mais non, on doit ici se contenter de regarder des vidéos même pas jolies et auxquelles on ne pige rien.
Pour ce qui est du jeu en lui-même, Arxel Tribe a volontairement réduit à néant toute difficulté. Selon l'éditeur, les gens ne veulent plus se prendre la tête sur les jeux d'aventure (ah ?). Ils souhaitent que ça aille vite et que le gameplay soit varié. C'est dans cette optique et pour toucher un public le plus large possible que le mode de déplacement a changé depuis Ring 1 (on dirige désormais le héros au clavier dans des décors fixes). C'est aussi pour cela que le titre intègre maintenant quelques petites phases dites d'action où le joueur est mis à contribution plus activement que dans les jeux d'aventure traditionnels (combats, séquences rythmiques...). Mais alors pourquoi ne pas avoir aussi intégré des séquences de foot ou des courses de F1 ? A en croire les études de marché, les gens apprécient ce genre de jeux, non ? En plus cela aurait permis à Ring 2 d'attirer les nombreux amateurs de ballon rond et de sport mécanique. Non, restons sérieux ! Les personnes qui achètent des jeux d'aventure veulent de l'aventure ! Ils n'ont que faire de ces phases d'action (bien souvent ratées) dans lesquelles il faut recommencer cent fois le même saut à cause d'un maudit angle de caméra mal approprié. Et je sais de quoi je parle, j'ai dû passer trois plombes à comprendre où se trouvait un fichu trou et trois autres à tenter de le franchir. Quand je pense qu'un simple travelling de caméra pour montrer où se situait la difficulté aurait suffit à régler le problème...
Niveau technique, Ring 2 n'est pas non plus un modèle du genre. Les environnements sont tous composés d'écrans précalculés plus ou moins jolis (là ça dépend clairement si on accroche ou pas au style Druillet) mais aussi incroyablement fixes ! Et ce n'est pas les quelques éléments 3D qui viennent maladroitement s'incruster par-dessus qui parviennent à leur donner un peu de vie. On aurait aimé que les feuillages s'agitent au vent, que les nuages bougent dans le ciel, bref que la nature vive ! Et que dire des ombres ? Celle du personnage central n'est réduite qu'à une malheureuse tâche sous ses pieds. On se croirait revenu cinq ans en arrière !
La finesse des graphismes est aussi à montrer du doigt. La 3D est grossière et les animations très raides. A ce propos, lorsqu'il court, la gestuelle de Siegfried ressemble à s'y méprendre à celle du héros de Final Cut, un autre titre d'Arxel Tribe. Curieux... Les cinématiques sont affreuses et ont visiblement été faites avec le "pixelisator" à fond. Cerise sur le gâteau (ou plutôt sur le cake) le jeu se permet même de planter sur certaines configurations pourtant annoncées comme compatibles au dos de la boîte. Point de vue son, enfin, le constat est aussi très déprimant. Entre la désynchronisation labiale, les dialogues qui commencent en plein milieu des phrases ou au contraire ceux qui se coupent après le premier mot, on est bien content de savoir lire pour pouvoir à peu près suivre ce qu'il se dit même si cela ne nous aide pas à grand-chose quant à la compréhension générale de l'histoire. Les musiques de Wagner, base de l'histoire, accompagnent la progression, mais elles sont tellement discrètes qu'on finit par les oublier. Enfin bref, Ring 2 est mauvais sur toute la ligne et dénature une nouvelle fois l'histoire originale de l'anneau de Nibelhungen. Terminons tout de même sur une note positive. Après s'être une première fois retourné dans sa tombe à la suite de Ring 1, Wagner doit maintenant se trouver à l'endroit. Merci Arxel Tribe.
- Graphismes12/20
L'ambiance futuriste fantasy ne plaira sûrement pas à tout le monde tout comme le héros directement inspiré de la tribu des Brownies dans le film Willow. D'un point de vue technique, c'est vraiment pas fameux. Tout est très cheap, voire complètement moche (particulièrement les cinématiques et les personnages). Attention, le jeu ne passe pas sur toutes les configurations.
- Jouabilité7/20
Si les déplacements ne posent pas vraiment de problème, on bute bêtement devant des passages où la caméra ne favorise pas la visibilité de l'action.
- Durée de vie11/20
Ring 2 réserve moins de dix heures de jeu à ceux qui auront la patience d'aller jusqu'au bout. Les énigmes sont d'un niveau deuxième année de maternelle mais on ne sait pas toujours pourquoi on doit les résoudre.
- Bande son7/20
Malgré les musiques de Wagner en arrière-plan, les nombreux bugs rencontrés dans les dialogues incitent à couper le son pour jouer.
- Scénario8/20
A quoi bon disposer d'une bonne histoire si on ne sait pas la raconter ? C'est ce qui arrive avec Ring 2 qui laisse régulièrement le joueur dans le flou le plus total. A croire que les développeurs ont cru que le scénario était déjà connu de tous et qu'ils pouvaient se permettre de le passer sous silence en ne laissant parler que les images. Grossière erreur !
Mr et Mme Ard ont un fils, comment l'appellent-t-ils ? Ring ! Plus sérieusement, Ring 2 a du oublier dans ses bagages un élément essentiel à un jeu vidéo : l'amusement. Mais si ça se trouve c'est comme ça qu'on s'amuse chez Arxel Tribe. Mourir bêtement toutes les 5 minutes, se taper de vilaines cinématiques et ne rien comprendre à ce que l'on fait, c'est vrai que ça a son charme ! Très peu pour moi.