Le jeu vidéo est rempli de secrets et d'anecdotes, qui ne font parfois surface que des années après les faits. Cultivant encore le culte du secret, l'industrie n'hésite que rarement à changer son fusil d'épaule afin d'aller chercher le succès. Personne n'y échappe, et encore moins les grandes licences.
Metal Gear Solid : Peace Walker n'aurait pas dû être un spin-off
Épisodes numérotés, changement de gameplay, sous-titres plus explicites... Le jeu vidéo cherche toujours à trouver la bonne formule pour se vendre, et les envies des développeurs se heurtent parfois aux ambitions des éditeurs ou aux nécessités du marketing. Un mauvais titre, un changement mal amené ou une mauvaise communication, et ce sont des années de travail qui peuvent tomber aux oubliettes en raison d'un échec commercial. La liste des titres concernés serait longue comme un jour sans pain, et ce n'est pas tout à fait ce que nous intéresse aujourd'hui.
Il y a 14 ans, à une époque où Sony misait beaucoup sur sa PSP, les joueurs découvrent Metal Gear Solid : Peace Walker, dont l'action se situe après Metal Gear Solid 3 : Snake Eater et Metal Gear Solid Portable Ops, et avant Metal Gear Solid V Ground Zeroes et Metal Gear Solid V : The Phantom Pain. S'il est dépourvu de numéo, Peace Walker est pourtant très loin d'être un simple spin-off. Se déroulant en 1974 au Costa Rica, ce jeu destiné à la console portable de Sony était en réalité prévu pour être... Metal Gear Solid V. Oui, vous avez bien lu. Dirigé par Hideo Kojima, Metal Gear Solid : Peace Walker aurait dû être un épisode majeur de la célèbre franchise. C'est le game designer lui-même qui l'a annoncé dans une série de tweets publiés à l'occasion de l'anniversaire du jeu.
Quatorze ans se sont écoulés depuis le lancement de "PW", époque où j'avais encore une quarantaine d'années. C’était à peu près à l’époque où de nombreuses sociétés de jeux commençaient à se tourner vers le développement d’applications pour téléphones à clapet. Après avoir créé MGS4, nous avons réalisé la nécessité d'un moteur unique. Le saut interviendra une fois le moteur terminé. D'ici là, PW a prévu de proposer un MGS qui évolue horizontalement. Initialement, elle s'appelait MGS5PW, mais en raison de la forte opposition des marchés étrangers, la numérotation a été abandonnée. Puisqu'il s'agit d'un jeuPSP, la tranche d'âge cible a été réduite aux élèves du primaire, du premier cycle du secondaire et du secondaire. L'objectif était de faire découvrir la licence aux jeunes et de gagner des fans auprès des deux générations, parents et enfants.
Un épisode mal-aimé ?
L'opposition est donc venue du service marketing international, qui souhaitait attirer un nouveau public en retirant le numéro et en adoucissant le ton. Tout en introduisant des mécaniques qu'on retrouvera plus tard dont l'exfiltration par ballon Fulton, Peace Walker adopte un ton proche du shonen. Il questionne l'existence des armes nucléaires, explorant des notions comme la dissuasion et la paix temporaire. M. Mizushiro, M. Sugita et Yoshitada Otsuka ont pris en compte les opinions de leurs fils, issus "de la génération PSP" lors du choix des personnages. Le jeu a obtenu un T auprès de l'ESRB (13+) aux Etats-Unis, mais une scène de torture a été modifiée au Japon (remplacée par des chatouillements) pour obtenir un CERO C (15 ans et plus).
Limité par la PSP, Peace Walker propose des missions courtes et des cinématiques en images fixes animées. Sorti plus tard en version HD sur PS3, Peace Walker connaît un succès critique (8.5 sur Metacritic pour la version PSP, 7.9 pour la HD) malgré des ventes inférieures aux MGS numérotés. Son expérience unique, fruit de contraintes techniques et d'un public cible différent, en fait un épisode marquant et parfois sous-estimé de la saga Metal Gear Solid. Comme vous le savez, Metal Gear Solid V viendra plus tard boucler la boucle, dans un contexte beaucoup plus complexe. Le titre ne sera jamais vraiment terminé, et il s'agira du dernier de Kojima chez Konami, Silent Hills ayant été annulé.